Et si l’institut devenait un espace d’émancipation féminine ?
Aline Frambourt.
Le métier d’esthéticienne a grandement évolué depuis ses débuts. Il n’est plus seulement question de pratiquer de simples épilations ou soins du visage, l’approche est holistique et sur-mesure. Toutefois, pour proposer des prestations qualitatives à vos clientes, il est essentiel de vous former. Les diplômes d’esthétique ne suffisent pas.
Un concept riche grâce aux formations
Aline Frambourt, gérante de l’Institut Rayon de Soleil à Orléans, l’a bien compris. En 2011, elle rachète l’institut au sein duquel elle effectue son apprentissage. Puis, au fil des années, elle en fait évoluer le concept, passant de 40 à 140m2, et d’un institut traditionnel à un cocon de bien-être holistique. Les prestations esthétiques proposées comprennent des soins corps, beauté des ongles et du regard, soins visage, massages, épilations, soins du cuir chevelu. Grâce aux nombreuses formations que l’esthéticienne a suivies, elle agit désormais à la fois sur le physique et l’émotionnel chez ses clientes en intégrant par exemple la pleine conscience dans ses protocoles. Son institut cartonne, à tel point qu’elle a dû embaucher quatre esthéticiennes !
Animée par l’ambition de proposer une approche globale du bien-être féminin et d’enrichir son savoir, Aline se forme en 2015 à la naturopathie, puis à la réflexologie. «Certaines de mes clientes n’obtenaient parfois pas de résultat à la suite d’une séance de technologie à visée minceur. Et lorsque je leur prodiguais des conseils diététiques pour favoriser les résultats, elles ne me prenaient pas au sérieux. Car une esthéticienne n’est pas médecin. Et à l’époque, la naturopathie était considérée comme sectaire !» raconte l’esthéticienne. Il n’a donc pas été évident pour notre interlocutrice d’asseoir son expertise en naturopathie.
La création de O Féminin
Pendant le deuxième confinement lié au Covid, comme toutes les autres esthéticiennes, Aline n’a pas le droit de travailler. Son code APE affilié au métier de l’esthétique l’en empêche. Elle en profite donc pour continuer de se former, notamment à la symptothermie. «De plus en plus de mutuelles remboursaient les séances de réflexologie. Cela a initié une réflexion qui m’a menée à différencier mes deux activités : l’esthétique et les prestations d’accompagnement de bien-être au féminin. Il était important pour moi de scinder ces activités pour mes clientes et moi-même. C’est alors que j’ai créé la société O Féminin, ce qui m’a permis d’obtenir un code APE affilié aux activités de santé humaine non classées ailleurs» explique Aline.
Des consultations de naturopathie, en réflexologie, de lecture biologique (décryptage des émotions et de leurs impacts sur la vie générale) et en symptothermie sont ainsi proposées depuis par Aline au sein de son institut. Elle ne passe plus en cabine pour les soins esthétiques.
La symptothermie, c’est quoi et c’est pour qui ?
En explorant des approches naturelles de gestion de la fertilité, Aline s’est intéressée à la symptothermie.
La symptothermie est une méthode naturelle de gestion de la fertilité féminine, utilisée aussi bien pour concevoir un enfant que pour éviter une grossesse. «Avant tout, elle permet aux femmes de mieux comprendre le fonctionnement de leur corps. C’est leur redonner un pouvoir de choix, ce qui est encore trop rare en matière de gestion de la fertilité. Lorsqu’on ne souhaite pas tomber enceinte, on nous oriente souvent vers des traitements hormonaux, tout en nous mettant en garde contre leurs effets secondaires. Quant aux alternatives non hormonales, elles ne sont pas toujours bien tolérées non plus. Il fallait donc une autre voie, et la symptothermie en est une» explique la cheffe d’entreprise.
La prise en charge des clientes en symptothermie
Cette prestation est présentée comme un outil à transmettre génération après génération.
Le premier rendez-vous
Le premier rendez-vous permet d’établir un premier contact avec la cliente. «Lors de ce rendez-vous, j’aborde avec elle des sujets très personnels : l’intimité, les tabous… C’est pourquoi il est important qu’il y ait une bonne entente avec la cliente» précise l’esthéticienne.
Lors du premier rendez-vous, Aline explique à sa cliente le fonctionnement du cycle qui est souvent mal compris. «Beaucoup de femmes pensent que le premier jour des règles commence avec des pertes marron, alors que ce n’est pas le cas. De même, une majorité pense à tort que l’on ovule à 14 jours. D’autres pensent ne pas être fertiles pendant leurs règles» souligne Aline.
La mise en place de la méthode
C’est à l’issue du premier rendez-vous que la méthode est initiée. Trois rendez-vous à l’institut sont nécessaires à la mise en place de la méthode. Ensuite, des échanges par mails réguliers prennent place.
Ces échanges permettent d’interpréter les cyclogrammes. Si besoin, Aline se tient disponible pour échanger par téléphone avec sa cliente.
Le premier mois est un temps d’apprentissage et d’observation pour la cliente. «90 % des femmes ne remarquent pas que leur fluide cervical (sécrétions vaginales) n’est pas le même au début, au milieu et à la fin de leur cycle. Mais cela n’est pas étonnant car nous ne l’avons jamais appris ! Les femmes ne connaissent pas leur corps, ce pourquoi ce temps d’observation est nécessaire dans un premier temps» explique notre interlocutrice.
Au fur et à mesure des rendez-vous, les femmes apprennent à gérer leur fertilité.
Les femmes apprennent, au fur et mesure des consultations et des observations qu’elles effectuent, à gérer leur fertilité. Ceci, à l’aide de trois données : la prise de leur température corporelle, l’aspect de la glaire cervicale et le ressenti physique.
À long terme, l’objectif des consultations en symptothermie est de rendre la cliente autonome dans la gestion de sa fertilité. Généralement, les femmes consultent Aline pendant une année. Année nécessaire au calcul des cycles. Une fois cette période passée, les femmes ont acquis leur autonomie.
Le suivi annuel est à 399 euros, qui comprend les rendez-vous, le suivi, ainsi qu’un thermomètre nécessaire au suivi.
Les hommes se sentent aussi concernés
Au début, Aline recevait en consultation de symptothermie uniquement des femmes, même lorsqu’elles étaient en couple. Aujourd’hui, de plus en plus d’hommes participent également à ces rendez-vous. «La décision de ne pas avoir d’enfant doit être portée par le couple, et non uniquement par la femme. Il est essentiel que les deux partenaires soient alignés sur la manière de gérer les périodes de fertilité - que ce soit par l’abstinence, l’utilisation de préservatifs, ou d’autres moyens. D’ailleurs, ce sont souvent les hommes qui expriment le souhait que leur compagne arrête la contraception hormonale. On observe aussi une hausse des demandes de vasectomie» analyse Aline.
La synergie entre les prestations et les consultations
«Les prestations que je propose dans la partie institut de ma structure viennent en complément des consultations. Il m’arrive, par exemple, de conseiller à une cliente suivant un traitement hormonal lourd, dans le cadre d’un projet de grossesse, de réaliser des séances de Iyashi Dôme afin de favoriser l’élimination des toxines par la sudation. Une femme en désir d’enfant peut également bénéficier de séances de réflexologie plantaire ou auriculaire, qui vont agir en profondeur sur le plan émotionnel. Lorsque l’on prend conscience du lien entre les blocages émotionnels et la fertilité, cela permet souvent de lever certains freins» explique Aline.
Des clientes éclairées
Qu’elles aient ou non le désir d’avoir des enfants, les femmes reçues par Aline se disent ravies de l’accompagnement qu’elles ont reçu. La plupart regrettent même de ne pas avoir consulté plus tôt ! «Elles repartent avec une compréhension claire du fonctionnement de leur corps, bien au-delà de la question de la grossesse» souligne Aline.
Une prestation attrayante
Lorsqu’Aline a lancé sa deuxième activité, elle travaillait seule. Pour parvenir à faire connaître ses nouvelles prestations, elle a pu compter sur sa clientèle esthétique qui lui a fait entièrement confiance. «Mes clientes sont venues, elles ont adhéré immédiatement à ces nouvelles prestations. Elles en ont parlé à leur entourage, ce qui a eu un effet boule de neige. Et cela m’a permis d’atteindre une clientèle plus large» explique l’esthéticienne. Un bouche-à-oreille qui a été bénéfique pour faire connaître les consultations de symptothermie proposées par Aline.
En outre, la symptothermie a bénéficié d’une belle publicité sur les réseaux sociaux. Étant donné que peu de professionnels y sont formés, Aline n’a pas rencontré de difficultés pour attirer des clientes à Orléans. Pour ce faire, elle mise sur une communication sur les réseaux sociaux et auprès des clientes de son institut.
“Me former à la symptothermie m’a permis d’atteindre une clientèle plus large.”
Aline reçoit essentiellement des femmes en quête de méthode de contraception naturelle et des couples qui ne souhaitent pas avoir d’enfants. En moyenne, ses clientes sont âgées entre 22 et 30 ans. Aujourd’hui, Aline comptabilise une trentaine de clientes pour cette prestation. 60 % de la clientèle est extérieure à l’institut de beauté Rayon de Soleil, l’autre activité de l’esthéticienne.
La formation suivie
La formation qu’Aline a suivie, auprès de Claire Michelin, sage-femme de métier, est complémentaire aux autres formations qu’elle a pu suivre comme la naturopathie. Cette formation lui a permis de comprendre comment fonctionne le corps des femmes, comment en prendre soin tout au long de sa vie, comment vivre la ménopause en douceur, les effets des hormones de synthèse, les origines du cancer du sein…
La formation s’est déroulée sur deux ans, alternant sessions d’apprentissage et temps de suivi régulier. L’esthéticienne a dû suivre en symptothermie, pendant les deux années, dix femmes, à titre gratuit, pour apprendre. L’obtention de la certification est soumise aux progrès réalisés sur les deux années et d’un examen écrit final.
Le rôle de l’esthéticienne dans l’accompagnement des femmes dans leur bien-être
En cabine, les clientes des esthéticiennes se livrent souvent en toute confiance. Selon Aline, cela demande aux professionnelles d’adopter une posture d’écoute bienveillante. «Parfois, il n’est même pas nécessaire que la cliente parle. On ressent ce qui ne va pas. Une fois seule en cabine, il arrive qu’on soit la seule personne à qui elle ose se confier» explique-t-elle.
Elle se souvient notamment d’une cliente venue grâce à un bon cadeau pour un massage. C’était leur première rencontre. Avant le soin, Aline lui avait proposé une épilation du maillot. Pendant la séance, la cliente remarque une affiche, comportant le logo de l’institut et les spécialités d’Aline, sur les consultations en symptothermie. Intriguée, elle l’interroge. Mère de deux enfants, elle lui confie : «Je n’ai jamais osé en parler à ma sage-femme, à ma gynécologue, ni à mon entourage… Mais je n’ai jamais ressenti de plaisir de toute ma vie. Que puis-je faire ?». Aline sort alors son manuel d’anatomie et lui montre où se situe le clitoris - ce que cette femme ignorait jusque-là.
Pour Aline, il est essentiel que les esthéticiennes aient une connaissance approfondie de l’anatomie féminine. Cela renforce leur légitimité. «Nous avons toute notre place, à condition de ne pas se réduire à l’idée : je ne suis qu’une petite esthéticienne sans formation, sans savoir…» insiste-t-elle.
Il convient de noter que certains professionnels de santé approuvent ce que propose Aline, étant donné la formation poussée qu’elle a suivie et ses connaissances pointues sur la santé féminine.