Notre cliente mystère Christine a testé pour vous les extensions de cils proposées par Groupon. Dealissime, Groupon, KGBdeals, Bon Privé... les sites d'achats groupés ont le vent en poupe avec leurs offres quotidiennes envoyées à des milliers d'internautes.
Parmi celles-ci, près de 60 % concernent le secteur de l'esthétique : cures minceur, modelages californiens, réflexologie plantaire, fish pédicure et autres épilations laser font les beaux jours de ce nouveau mode de consommation.
Et pour cause : en moyenne 70 % de réduction sont opérées sur ces prestations haut de gamme, une aubaine pour les consommateurs en ces temps de crise. Une aubaine ? L'expérience que j'ai vécue tend à montrer le contraire...
UNE OFFRE TRÈS ALLÉCHANTE
Comme chaque jour, je reçois par e-mail les offres d'un des leaders du marché, Groupon. Parmi la dizaine de deals proposés ce jour-là, une attire mon attention : «Des yeux de biche grâce à une extension de cils avec pose cil à cil à 39 € au lieu de 115 €».
Un an auparavant, j'avais réalisé une prestation de ce type, achetée sur Groupon, dans un institut du 16ème arrondissement à Paris. Suite à cette heureuse expérience, je décide de me lancer et commande mon bon. L'achat n'est pas immédiat, il n'est effectif qu'une fois le nombre de personnes minimum atteint.
Le lendemain, mon deal est confirmé, et je reçois mon coupon ; je vais pouvoir prendre rendez-vous directement auprès de l'institut, situé dans le 20ème arrondissement. L'accueil est professionnel, je donne mes coordonnées ainsi que le numéro de mon bon et le rendez-vous est pris. Il aura lieu dans un mois ; l'offre a apparemment eu du succès...
DES PRESTATIONS HAUT DE GAMME
Le jour J, j'arrive devant la vitrine 15 minutes en avance et, première surprise, des mannequins portant différentes tenues sont présentés en vitrine ; je crois m'être trompée d'adresse mais un coup d'oeil à la pancarte spécifiant «institut de beauté» m'incite à pénétrer dans l'étrange institut/boutique de mode.
Une fois à l'intérieur, une forte odeur de citronnelle me saisit et je découvre la décoration on ne peut plus hétéroclite de l'endroit. Derrière les mannequins se trouve un espace coiffure constitué d'un fauteuil Louis XV et d'une coiffeuse baroque, un espace manucurie dans un camaïeu de jaune et de vert acidulés et un coin salon, orné de la photo d'une athlète courant les 800 mètres.
Au fond, se trouve le comptoir, et, chose étonnante, un gigantesque écran plasma diffusant des jeux télévisés.
À droite du comptoir un carré de plexiglas découvre l'unique cabine de soins, à l'intérieur de laquelle j'aperçois la gérante de cet étonnant lieu. Celle-ci me décroche un grand sourire et quitte la cabine pour m'accueillir très cordialement. Après lui avoir remis le bon, elle me demande quel résultat je souhaite obtenir. Je lui fais part de mes attentes, quelque chose de naturel mais de plus fourni et plus long, un effet mascara volumateur. Elle acquiesce, m'invite à patienter dans le coin salon et retourne en cabine.
Je détaille la décoration, allant de surprise en surprise, et quelque chose retient mon attention sur la photographie de l'athlète. Non, pas de doute, il s'agit bien de la gérante dont j'observe le visage à travers la lucarne de plexiglas. Mon attente se poursuit dans l'odeur de plus en plus inconvenante de la citronnelle, mais j'ai de quoi patienter entre les nombreuses revues féminines à disposition et les exclamations des concurrents acharnés du jeu télévisé.
Mi-amusée, mi-perplexe, je feuillette la carte de soins et me détends quelque peu en lisant le rassurant dépliant. L'équipe est «qualifiée», le lieu est «douillet et intime», les prestations «haut de gamme». Je ne suis donc pas dans un endroit étrange, mais dansun institut intimiste qui reflète la personnalité haute en couleurs de la propriétaire. Ouf. De plus, les nombreuses prestations sont dans les prix du marché et le document est plutôt agréable, clair et bien mis en page. Je suis rassurée. La gérante raccompagne sa cliente précédente et m'invite à la rejoindre en cabine.
MON RÊVE TOURNE AU CAUCHEMAR
Après m'avoir débarrassée de ma veste et de mon sac à main, cette dernière me tend une charlotte que je place sur mes cheveux puis me fait allonger sur le fauteuil de soin. Je m'exécute docilement, tout en me demandant comment elle avait bien pu changer le papier recouvrant le fauteuil de soin après sa précédente cliente, sans que je n'ai rien vu par la lucarne. Mes élucubrations sont interrompues lorsqu'elle me demande de lever les yeux au ciel pour m'appliquer ce que je pense être un patch de silicone.
Je me délecte à l'avance de la délicieuse sensation qui m'attend. Lors de ma précédente pose d'extensions cil à cil, la fraîcheur et la douceur du patch en silicone avait lissé mon regard pendant la pose de telle manière que lorsque j'avais rouvert les yeux, je m'étais découverte fraîche et reposée, et avec de magnifiques cils fournis et très naturels.
Je suis brutalement tirée de mon rêve éveillé par une sensation extrêmement désagréable : elle venait d'appliquer quelque chose de collant sur mon contour de l'oeil, non, de coller quelque chose... «Mais qu'est-ce que vous faites ?» me suis-je écriée. «Je ne peux plus ouvrir l'oeil !» «Détendez-vous, ne bougez pas, c'est normal, c'est pour que vous n'ouvriez pas les yeux à cause de la colle.» Me détendre, dans l'état actuel des choses, devenait compliqué... Elle venait en effet d'appliquer du sparadrap sur mes cils inférieurs et sur ma paupière supérieure.
Du sparadrap ! Mon rêve tourne au cauchemar. Les paupières scotchées, aveugle, à la merci de cette soi-disant professionnelle, je suis sérieusement inquiète. Je tente de me raisonner. Lorsque je lui parle du patch en silicone, elle me rit presque au nez en disant que j'ai un bon Groupon, que 180 personnes avant moi ont eu un bon Groupon et qu'elle est en rupture de stock pour les patchs en silicone ! Puis, elle me rassure que le sparadrap n'est pas vraiment collé, que cela ne sera pas douloureux lorsqu'elle l'enlèvera et ajoute que maintenant ça suffit, je ne dois plus toucher au sparadrap, je dois me détendre et la laisser faire son travail. Soit. Je serre les dents et essaye d'obtempérer, tandis qu'elle commence pose. Je sens quelques petits picotements ça et là, mais rien de vraiment douloureux.
Voulant réchauffer l'ambiance, elle tente d'engager la discussion : «Vous travaillez dans quel domaine ?». Souhaitant préserver ma couverture, je réponds vaguement et la questionne à son tour sur son passé de championne olympique. Car oui, mon as du sparadrap a participé deux fois aux Jeux Olympiques. Elle me raconte tout, les épreuves dont la vie d'une sportive de haut niveau est jalonnée, les efforts quotidiens, les entraînements, les privations, l'absence de vie de famille, la concurrence féroce au sein même de l'équipe, les années d'abnégation, l'espoir, la flamme olympique, et puis tous les rêves qui s'écroulent à cause d'une blessure survenue à l'entraînement... «Ah oui, vraiment, je vous assure, c'était hyper dur de voir sa coéquipière qui était toujours derrière vous remporter une médaille, ça vous retourne les tripes, ça vous met la rage, ça vous...»
«Aïe !» «Ah pardon, excusez-moi. Où j'en étais déjà ?» Je ne sais pas, je ne sais plus, je larmoie sous mon sparadrap. Il faut que j'arrête car elle m'a prévenue, les larmes vont décoller le sparadrap et ensuite la colle risque de pénétrer dans mon oeil. Je respire à fond et prends mon mal en patience, puis articule que je souhaite voir le résultat avant de passer au deuxième oeil. «S'il vous plaît».
Elle obtempère et enlève le sparadrap de mes yeux en utilisant une pince à épiler ; c'est très désagréable mais moins douloureux que je ne l'imaginais. J'ouvre l'oeil qui vient d'être libéré et me regarde dans le miroir qu'elle me tend : le spectacle est affligeant. Mon contour de l'oeil est rouge, il tire ; mes yeux sont injectés de sang et mes cils, enfin mes faux cils, sont... Comment dire... Faux !
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Cliché Collistar
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