Parcours de formatrice. Nadège Dupin-Cottenceau, la passion de transmettre

Objectif : devenir enseignante

Comme beaucoup de jeunes filles, je voulais devenir maquilleuse professionnelle. Pour ce faire, mes parents m’ont inscrite à l’École Françoise Morice en CAP Esthétique. À l’époque, en 1986, il s’agissait de la seule école parisienne qui proposait des cours d’anglais dans son cursus. Mes parents tenaient à ce que je développe mon vocabulaire professionnel dans cette langue. Dans le cadre des cours de pratique, j’ai découvert le soin pour lequel j’ai eu un véritable coup de cœur. Ces nouvelles passions pour le soin et la cosmétologie ont pris le pas sur le maquillage. À la suite de mon CAP, l’École Françoise Morice a ouvert sa première classe de BP en alternance que j’ai intégrée. J’étais en alternance au sein d’un institut de beauté traditionnel et j’ai réalisé que les soins en cabine ne me correspondaient pas... J’ai clôturé mon cycle d’étude par le BTS MECP, toujours à l’École Françoise Morice. C’est à ce moment que j’ai eu pour nouvel objectif de devenir enseignante en école d’esthétique. Cela m’est apparu comme une vocation.

Un début de carrière sur les chapeaux de roues

En fin de formation, j’ai envoyé des dizaines de candidatures spontanées et je suis rentrée chez Ella Baché en tant qu’animatrice/formatrice France en CDI. Je formais des professionnels de l’esthétique aux produits de la marque et j’ai découvert l’animation en institut. Je ne suis restée que quelques mois, mais cela a été passionnant. Durant cette expérience, M. Morice m’a contactée pour m’informer de sa recherche d’une enseignante pour l’école.

Faire carrière dans l’enseignement était mon objectif, je ne pouvais pas refuser ! Mais j’avais 23 ans, j’étais bien trop jeune pour devenir enseignante et je n’avais pas assez d’expérience, je n’étais pas très à l’aise dans ce rôle... J’étais restée en contact avec Ella Baché qui m’a proposée de devenir formatrice internationale. M. Morice a compris les raisons de mon départ. J’étais donc de retour chez Ella Baché en 1994.

Formatrice internationale

Pendant six années de 1994 à 2000, j’ai eu l’opportunité de découvrir 73 pays ou États à travers le monde. Je partais environ neuf mois chaque année. Mes missions principales consistaient en la formation des distributeurs, des commerciaux, des esthéticiennes et des formatrices. J’ai eu l’occasion d’animer des conférences au Congrès d’Esthétique à Miami ou encore à Lisbonne. Cela a été une expérience extraordinaire !

L’esthétique à travers le monde

J’ai fait des rencontres qui m’ont permis de découvrir l’esthétique sous toutes ses formes. L’esthétique en France ne repose pas sur les mêmes modèles que les autres pays et l’apprentissage varie aussi en fonction de la culture.

L’Islande

Des cours de soin de la peau sont dispensés dans tous les collèges d'Islande. Cela fait partie de l'éducation générale. C’est une chose que l’on ne fait pas du tout en France. Je n’ai pas dispensé de cours au collège mais je suis allée dans des écoles d’esthétique pour former de futures professionnelles.

La Chine

En Chine, les jeunes élèves ont à peine trois mois de cours pour apprendre les techniques d’application des produits, sans approfondir toute la biologie cutanée. La culture du corps est plutôt dédiée aux métiers du milieu médical ou du massage. Je leur enseignais donc autant les produits que les techniques.

La Jordanie

En Jordanie, les femmes qui portent le niqab sont très apprêtées. Elles soignent leur peau et aiment prendre soin d’elles. Elles ont été précurseures de l’épilation au sucre et au fil.

Adapter son approche

J’ai dû faire preuve de beaucoup d’adaptabilité dans le cadre de mes formations à l’international. Je découvrais la différence de culture. Sur place, les commerciaux de la marque me précisaient ce qu’ils attendaient de moi. Je pouvais être amenée à former 3 personnes ou 2 500 ! C’était la surprise à chaque fois.

Les qualités d’une formatrice internationale

Lorsque l’on travaille à l’étranger, peu importe le métier, il faut faire preuve d’une grande ouverture d’esprit et de patience. C’est-à-dire qu’il faut savoir remettre en question sa façon de faire et reconnaître que nous ne sommes pas les meilleures. Il faut aussi s’adapter au niveau de formation des personnes. Par exemple, les Chinois travaillent très vite en termes de soins esthétiques, contrairement aux esthéticiennes françaises qui prennent le temps sur les modelages et les manœuvres profondes. La patience est une qualité très importante car les personnes ne comprennent pas forcément ce que l’on veut dire, encore une fois cela dépend de la culture et aussi de la barrière que peut être la langue, dans ce cas, il faut attendre que le traducteur traduise. Les échanges sont donc très longs.

Avoir conscience des inconvénients

Être formatrice internationale est un métier très prenant. Il m’est arrivé de rester deux jours chez moi entre un retour de Chine et un départ pour New-York. Nous passons énormé- ment de temps dans les aéroports et les avions. La vie privée peut donc être difficile à concilier avec la vie professionnelle. Il faut être prête à se consacrer à 1000 % à son travail. Toutefois, je retiens toute la richesse culturelle que j’ai pu acquérir.

Conseils pour être formatrice internationale

Je conseille aujourd’hui de parler au moins trois langues. Le Français et l’Anglais sont indispensables. L’Espagnol et l’Ita- lien me semblent aussi être des langues très importantes. Il faut avoir par ailleurs une culture de l’esthétique très développée. Il faut s’ouvrir sur les différentes cultures et être curieuse. Il faut aussi parfaitement maîtriser le vocabulaire professionnel via les books de formation des marques. Il est indispensable aussi de se renseigner sur les us et coutumes pour ne pas commettre d’impair (comme ouvrir un cadeau dans un pays où c’est très incorrect).

Retour à l'enseignement

Après six années à travers le monde, j’avais besoin de me poser et de retrouver un travail plus calme et j’avais toujours en tête de devenir enseignante. Maintenant, je me sentais prête et enrichie de mes années d’expérience en tant que formatrice internationale. En 2001, je suis donc retournée enseigner à l’École Françoise Morice pour les BTS. J’ai travaillé de 2001 à 2016 au sein de l’école. Petit à petit, mon rôle a évolué, d’enseignante à responsable du service alternance que j’occupe encore aujourd’hui.

Des missions variées

En tant que professeur en école d’esthétique, j’ai été amenée à enseigner en cours de pratique, de vente et sur l’option Formation Marque du BTS MECP. Ce dernier poste m’a permis de raconter à mes élèves mon expérience de formatrice internationale. C’est un métier de passion. J’ai particulièrement apprécié la dimension sociale de ce travail. Dans le cadre d’une école privée comme Françoise Morice, j’ai été amenée à suivre les contrats d’alternance de mes élèves, ainsi que de recevoir les candidates aux formations, les aider à trouver leur entreprise d’accueil et les suivre sur leur début de parcours professionnel. J’ai beaucoup aimé pouvoir animer les sketchs de vente car il s’agissait des moments les plus propices à l’échange. En tant qu’enseignante, je poussais mes élèves à donner le meilleur d’elles-mêmes, quitte à être parfois assez dure. Cela leur a servi car, aujourd’hui, celles avec qui je suis encore en contact m’en remercient.

Les qualités d’un enseignant

Il faut savoir dire à vos élèves que vous n’avez pas la réponse à leur question quand c’est le cas. Ensuite, il faut aller chercher cette réponse pour le prochain cours. Par ailleurs, il ne faut jamais perdre sa crédibilité. Si par exemple, vous ne répondez que partiellement à une question, l’élève va aller cher- cher la réponse et c’est là que vous perdez toute crédibilité. Il faut également savoir faire preuve d’empathie et entourer vos élèves. Ceci passe par le fait de savoir les regarder, voir quand cela ne va pas et pouvoir agir si cela est possible. Parfois, elles ont besoin de distance qu’il faut savoir leur accorder. Il faut également faire comprendre à vos élèves que c’est vous le professeur, que vous avez le savoir et non l’inverse. Si vous demandez à vos élèves quelque chose, vous devez, vous aussi, être en mesure de le faire. Le métier d’enseignant est difficile et très phagocytant. Cela prend beaucoup d’énergie et quand soi-même on est fatigué, il ne faut jamais le montrer. En effet, lorsque les élèves se retrouveront en cabine avec leurs clientes, elles ne devront pas le montrer. Il faut leur apprendre le métier.

Conseils aux enseignants

Le premier conseil que je peux donner est d’étudier vos cours et pour chaque phrase de cours vous poser la question «Pourquoi ?». Par exemple : «Un sérum s’applique avant une crème». Pourquoi ? Il faut savoir répondre à cette question. Lorsque je préparais mes cours, je les construisais en me posant toujours cette question. Le «pourquoi» permet de développer l’habilitation à enseigner. Je conseille aux jeunes enseignants de rester un maximum debout pendant leurs cours, la position assise est une position statique qui ne donne pas envie d’écouter. Le mouvement attire l’attention. Par ailleurs, une excellente cohésion d’équipe avec les autres enseignants est nécessaire. L’équipe que nous étions était très soudée. Nous nous échangions des conseils, nous nous entraidions. Une réelle solidarité doit subsister.

La vocation de toujours transmettre mon savoir

Accompagner ses élèves même après l’école

Pour des raisons personnelles j’ai quitté l’École Françoise Morice en 2016. J’ai occupé des postes administratifs dans plusieurs écoles. Je voulais arrêter l’enseignement. Aujourd’hui, en plus de mon emploi, et forte de 30 ans d’expérience, je coache mes anciennes élèves et des professionnels sur leur métier. Je les accompagne dans le digital pour faire face aux enjeux d’aujourd’hui et de demain. À titre gracieux, je les aide dans le développement de leur chiffre d’affaires, y compris hors exploitation, à donner le meilleur avec des solutions qui leur correspondent. J’aime ces échanges avec mes anciennes élèves et cela me tient à cœur d’essayer de toutes les retrouver. Les réseaux sociaux sont parfaits pour cela, qu’elles n’hésitent pas à me chercher ! Je suis tellement fière de voir comment elles ont évolué !

Un pied toujours dans le milieu scolaire

Depuis janvier 2019, j’ai intégré le Campus de l’Esthétique et du Spa anciennement l’École Françoise Morice, je suis responsable de l’alter- nance. J’aime toujours autant accompagner les élèves, même si je ne les ai plus en face-à-face, les croiser et avoir un court échange avec elles m’apporte toujours autant de satisfaction et de plaisir.