Parcours d'esthéticienne : Rachel Bettan
De la mode à l'esthétique
Master en marketing, management et stratégie d’entreprise, je me suis tournée vers le monde de la mode, ma passion, avec un diplôme de styliste. Naturellement, j’en suis venue au maquillage et à la coiffure pour me débrouiller seule lors de mes défilés.
En parallèle, j’ai eu l’occasion de découvrir le monde de l’esthétique grâce à mes parents qui géraient une école privée d’enseignement technique, l’École EPSECO sur Valence qui propose de nombreuses formations autant diplômantes que professionnelles et notamment en esthétique.
Très impliquée dans le monde professionnel grâce à mon père, Gilbert Bettan, qui a notamment été le président de la FFEEP (Fédération Française des Écoles d’Esthétique et Parfumerie) pendant plusieurs années, j’ai eu l’occasion de l’accompagner dans de nombreux déplacements professionnels et c’est ainsi que j’ai découvert l’univers de l’esthétique. Une nouvelle passion plus forte que le stylisme voyait le jour en moi. J’ai ainsi repris mes études pour me spécialiser dans ce secteur. J’ai passé le CAP, puis le BTS en VAE sans savoir précisément ce que j’allais faire en esthétique.
Mon parcours professionnel
Après avoir travaillé pour un grand groupe de textile français pendant plusieurs années, et après mes études d’esthétique, j’ai eu l’opportunité de me tourner vers l’enseignement au sein même de l’école de mes parents. J’ai commencé par enseigner le marketing et le management et, très vite, j’ai eu à gérer les sections d’esthétique.
Cela fait aujourd’hui 10 ans que j’exerce à l’EPSECO. J’ai pu évoluer vers un poste administratif de directrice pédagogique adjointe. Je donne encore beaucoup de cours mais je gère aussi des tâches plus stratégiques. Mon école est une petite structure familiale et nous sommes peu nombreux à devoir tout gérer.
Mon quotidien à l'école
Je suis en charge de toute la politique de communication et des ressources humaines. J’aime tout particulièrement la communication digitale et sociale car il faut en permanence trouver de nouvelles idées pour séduire.
Au niveau des ressources humaines, je mets en application mon goût des relations humaines et des échanges.
Dans mon équipe il n’y a pas de hiérarchie, je me bats pour le côté familial et je tiens à avoir un bon contact avec la quinzaine d’enseignants. On échange chaque jour, on rit, on partage de bons moments, nous formons une vraie équipe.
Mon quotidien RH ne se limite pas aux recrutements, aux plannings et aux payes, il s’agit de créer une équipe, d’en assurer la cohésion et la satisfaction au quotidien.
L’école propose tous les diplômes d’esthétique et notamment le BTS qui, pour moi, est l’avenir de notre profession car c’est le diplôme vraiment adapté à la réalité du terrain. Nous proposons également des formations qualifiantes courtes aux professionnels du secteur comme les extensions de cils ou les massages du monde que nous renouvelons chaque année.
L’école : une histoire de famille
L’École EPSECO existe à Valence depuis 1930, ma mère y est entrée en 1988 en tant que directrice pédagogique et enseignante. Suite à la faillite du groupe national EPSECO en 1995, mes parents ont repris la structure en créant une association à but non lucratif : l’Association Victor Leroy. L’objectif initial était de simplement permettre aux étudiants de l’époque de terminer leur année. Finalement, l’aventure continue encore aujourd’hui et nous avons poursuivi l’activité toujours sur le fonctionnement associatif. Notre priorité est d’offrir une chance à tous, quel que soit le niveau scolaire d’origine.
L’école, mais pas que…
L’esthétique est pour moi une telle passion que je ne peux me contenter de l’enseigner, il m’en faut plus ! Alors, je continue mon activité de make up artist, notamment en travaillant pour des associations locales et des projets à petits budgets qui méritent de voir le jour : soins des mains en EPHAD, via des associations où nous avons donné des conseils sur la mise en valeur du regard à des femmes suite à une chimio…
Passionnée par le face et le body painting, je participe également à de nombreux événements et concours à travers la France et l’Europe car relever des défis est pour moi une priorité qui me permet de me dépasser et d’avancer.
J’interviens aussi en tant qu’expert en esthétique pour aider les professionnels à développer leurs concepts et leurs idées. Énormément d’anciennes élèves me contactent pour avoir des conseils et de l’aide. Je reçois aussi régulièrement des professionnels locaux qui souhaitent échanger avec moi sur l’évolution du secteur et ma vision. Des professionnels de toute la France font également appel à moi. Cette dernière activité est née au travers de ma collaboration avec Les Nouvelles Esthétiques pour qui j’écris des articles et je fais des conférences.
Mon métier d’enseignante ne se limite pas à ce qu’elles obtiennent un examen
Mon expérience d'enseignante en esthétique
J’aime particulièrement ouvrir la porte de notre profession à mes étudiantes, partager et faire naître en elles ma passion et leur donner des «astuces». Mon métier d’enseignante ne se limite pas à ce qu’elles obtiennent un examen mais bien de les préparer à la réalité du terrain car demain ce que l’on attendra d’elles ce n’est pas d’être douées à l’école mais bien d’être d’excellentes professionnelles. Ce n’est pas toujours facile et il faut être créative pour faire découvrir tous les aspects de notre profession aux étudiantes.
C’est pour cela que l’école propose énormément d’activités professionnelles afin que les étudiantes découvrent un nouvel aspect de la profession et que cela puisse peut-être faire naître le goût pour une spécialisation professionnelle. Mes étudiantes apprécient énormément ces activités car elles n’avaient pas nécessairement envisagé cette méthode d’apprentissage, elles apprennent beaucoup.
L’évolution des élèves
Il y a 10 ans, les étudiantes n’étaient pas toujours motivées par le côté scolaire mais avaient un très fort respect des règles, de la hiérarchie et appréciaient le terrain.
Aujourd’hui, les jeunes arrivent en enseignement supérieur sans savoir vraiment ce qu’elles veulent faire et sans avoir vraiment travaillé. Nous sommes les premiers à leur imposer un comportement professionnel et cela est souvent difficile pour elles car elles ne le comprennent pas !
Aujourd’hui, les 200 étudiantes que nous accueillons par an demandent plus d’attention et de proximité relationnelle ; les frontières hiérarchiques ne sont pas toujours simples à accepter pour elles et on le voit en stage, les remarques sur leur comportement sont courantes : «Rachel, ton élève est très gentille mais il lui manque une attitude et une réflexion professionnelle». Ainsi, aujourd’hui, en plus des concepts théoriques et pratiques nous leur enseignons la bonne attitude, leur expliquons ce qui se fait et ne se fait pas, ce qui se dit et ne se dit pas.
L’évolution de l'esthétique
Nous sommes à un tournant dans notre secteur car tout a changé :
Des problèmes législatifs
Nous sommes constamment remis en question par les autorités ou d’autres corps de métiers et les lois ne sont pas toujours en notre faveur.
Prenons l’exemple des UV, à chaque nouveau décret c’est une restriction supplémentaire pour l’esthétique alors qu’il existe la vente libre d’UVA pour les particuliers !
Des problèmes commerciaux
Nous avons un vrai métier commercial et les connaissances en marketing sont essentielles. Le marketing est une science indissociable de la qualité de service, malheureusement la matière n’est pas enseignée dans tous les établissements scolaires.
Des problèmes générationnels
On ne trouve plus de personnel alors que de nombreuses candidates se présentent chaque année aux diplômes d’esthétique. Lors des recrutements on se retrouve souvent confronté à un manque de motivations… et plus loin encore un manque de passion. C’est un problème générationnel, les générations Y et Z n’ont pas les mêmes attentes ni la même vision du monde professionnel. Si nous voulons pouvoir travailler avec elles, il est important aussi que nous évoluions et que nous nous adaptions à leurs attentes.
Des problèmes d’innovation
Nous avons un secteur qui évolue en permanence, qui propose énormément de choses mais actuellement toutes les esthéticiennes n’ont pas encore pris conscience de l’importance de ces évolutions. Il y a de l’innovation et de la nouveauté et les proposer doit être une priorité.
Les consommatrices se lassent vite, elles ont besoin de choses différentes et de renouveau, cela les motive et nous permet de les fidéliser.
Un conseil à une élève en esthétique
Pour réussir en esthétique, il faut être passionnée et après, se battre et ne pas abandonner ! Souvent, les élèves en esthétique de tous les niveaux trouvent que les cours scientifiques sont trop durs et abandonnent alors qu’il n’y a rien à comprendre, ce n’est que du vocabulaire à apprendre et qui se maîtrise avec le temps. Dans notre métier, il faut s’accrocher et savoir rebondir, un échec doit être vu comme un moyen de faire mieux et de se dépasser.
Je continue à relever des défis
J’aime mon métier car il me permet de rencontrer au quotidien de nombreux professionnels et de découvrir en permanence des nouveautés. Mon objectif est d’aller toujours plus loin et pouvoir faire de nouvelles choses tout en relevant de nouveaux défis ! Ainsi chaque année je me passionne pour les nouveautés de notre profession et je participe à des formations professionnelles. On ne peut pas évoluer si l’on n’apprend pas de nouvelles choses. Se former tout au long de sa carrière est indispensable même si ce n’est pas toujours facile de retourner sur les bancs de l’école. C’est pourquoi, avec le temps, j’ai défini des critères clefs dans le choix des formations.
Choisir le bon centre
Le meilleur côtoie le pire ! Il est donc très important, avant de vous lancer dans une formation, d’avoir vérifié certains points sur le centre : l’histoire, les valeurs, la certification Data dock, la prise en charge des frais de formations par votre OPCA ou CPF, la durée de la formation, le contenu, les acquis à la sortie, le coût…
Choisir la bonne formation
Chaque année, votre secteur vous propose des nouveautés sorties de nulle part. Pas toujours simple de trouver la bonne formation… Quand je cherche un professionnel pour m’apprendre quelque chose, je m’intéresse beaucoup au contenu même de la formation. J’étudie le programme en détail et je détermine si cela va vraiment m’apporter du plus. Je me renseigne aussi sur le formateur car il est malheureusement fréquent que la formation professionnelle ne soit pas toujours enseignée par de réels professionnels de l’esthétique.
Se débrouiller
La formation professionnelle, c’est très bien, mais ça prend du temps et cela représente un coût. Il est parfois compliqué que je m’absente plusieurs semaines de mon poste d’enseignante et de directrice adjointe sans parler du financement de la formation ! Ainsi, au début de ma carrière, je n’ai pas pu suivre une année de formation intensive en école de maquillage, les coûts étaient trop élevés. Alors j’ai acheté beaucoup de livres (et je continue), beaucoup de vidéos de professionnels et je me suis entraînée, entraînée… jusqu’à obtenir un résultat. Mes proches sont les premiers à «subir» mes nouveaux défis car je m’entraîne beaucoup sur eux. Lorsque je me suis formée aux extensions de cils, mes copines étaient plus que ravies !
Avec le temps, j’ai pu, avec mes droits à la formation (CPF et anciennement DIF) financer des formations courtes dans des écoles prestigieuses et apprendre de nouvelles techniques : maquillage, master class avec des maquilleurs internationaux, formations en ongles, en extension de cils…
Ne restez pas bloquée sur le fait que vous ne pouvez pas payer ou dégager du temps pour vous former car des solutions il y en a ! Néanmoins, soyez vigilante car pour certaines formations, il est indispensable d’avoir une validation d’un centre reconnu comme pour les UV ou le maquillage permanent.
Un conseil pour un institut
Il y a beaucoup de petits instituts indépendants qui ont du mal à s’en sortir car ils proposent tous la même chose ! Si vous voulez réussir et attirer de nouvelles clientes, créez la surprise et proposez des choses que les autres ne font pas. Pour cela, il faut continuer à vous informer en permanence sur les évolutions, les nouveautés de notre secteur et surtout vous former. Je le constate tous les jours, les anciennes élèves qui réussissent le mieux sont celles qui ont compris cela et cherchent en permanence de nouvelles formations. Leurs clientes sont ravies et fidèles, elles aiment le dynamisme de leur praticienne.
L’avenir
Je veux continuer à enseigner et à diriger mon école car j’y trouve une vraie satisfaction et un vrai bonheur personnel.
Lorsque mes anciennes élèves m’appellent après leur départ pour me demander des conseils ou encore pour m’annoncer des nouvelles liées à leur vie (emploi, mariage, enfant…), je ne peux qu’avoir le sourire car en tant qu’enseignant on sait que l’on a participé à cela ; que nos «enfants» sont devenus grands car notre métier, encore une fois, ce n’est pas juste leur permettre d’avoir un diplôme -cela n’est qu’un bout de papier- mais bien d’avoir une belle vie.
Aujourd’hui, je suis à la recherche de nouveaux défis… Je ne sais pas encore où cela me mènera mais ce qui est sûr, c’est que je continuerai à faire de nouvelles choses et serai en compétition avec moi-même.