« Je suis socio-esthéticienne et socio-conseillère en image »

L'esthétique a été pour moi une véritable vocation dès l’adolescence. À l’âge de 12 ans, ma mère m’a proposée de m’emmener chez son esthéticienne pour réaliser ma première épilation. Je suis devenue alors une jeune cliente à mon tour. En classe de troisième, j’ai effectué mon stage d’observation-métier dans ce même institut de beauté et cela a confirmé ma passion. En effet, depuis mon enfance, j’ai ce don «de voir le beau» en chacun et de conseiller pour mettre en valeurs ses atouts. Je vivais à cette époque à la campagne et le rôle qu’avait cette esthéticienne, Hélène Héliard, auprès des habitants du village de Neuvy-sur-Loire, me touchait tout autant que celui que pouvait jouer une boulangerie ou bien une pharmacie. De plus, cette esthéticienne avait su me rendre à l’aise avec mon corps et c’est ce qui par la suite m’a motivée pour faire de même avec mes clientes.

Mes débuts dans l'esthétique

J’ai passé mon BTS Esthétique-Cosmétique à l’École ESTEC à Bourges. De nouveau, Hélène m’a accueillie pour réaliser mes stages d’études. À l’issue de mon BTS, en 2002, elle m’a embauchée car elle avait pour projet de racheter un autre institut dans un village voisin. J’ai travaillé dans tous ses établissements où j’ai eu de plus en plus de responsabilités. J’ai exercé auprès d’Hélène pendant quatre ans, avant de me lancer dans l’enseignement.

De la cabine à la salle de classe

Le directeur de l’ESTEC, mon ancienne école d’esthétique, avait connaissance de mon souhait de m’orienter dans l’enseignement. Il m’a contactée pour me proposer un poste de professeure en esthétique. Je suis donc retournée à Bourges pour enseigner d’abord à l’ESTEC, puis à l’École Pigier. J’ai ainsi enseigné aux élèves de CAP principalement la biologie et les soins corps pendant trois ans. Cette posture d’accompagnante et d’aide à la formation a réveillé ma fibre sociale.

L'explosion du spa

En 2009, le secteur du spa connaissait un véritable essor. Cela me fascinait. J’ai donc quitté mon poste de formatrice afin d’aller à Paris pour préparer un Bachelor de Spa Manager.

Spa manager chez Lovely Spa

J’ai suivi l’enseignement du Bachelor en alternance, chez Lovely Spa dans le 16ème arrondissement. En 2010, j’obtenais mon diplôme et Laetitia Fontanel, la fondatrice de Lovely Spa, m’a embauchée en tant que spa manager. J’encadrais une équipe de 10 praticiennes et nous avions huit cabines. Laetitia m’a permis d’avoir accès à une vaste quantité de technologies pour le soin du visage et de développer mes qualités managériales.

La quête de sens

Je travaillais beaucoup, la vie parisienne était très stressante, trop, j’ai fait un burn-out. Cela a été l’occasion d’une complète remise en question. Bien que nous recevions des célébrités, cela ne reflétait pas mes valeurs… À mon initiative personnelle, j’ai réalisé un bilan de compétences et c’est la fiche du métier de socio-esthéticienne qui est apparue. J’ai quitté mon poste de spa manager à l’été 2013 afin de pouvoir suivre la formation de socioesthéticienne au CODES.

La formation de socio-esthéticienne

Au CODES de Tours, pendant neuf mois, j’ai été formée pour intervenir dans trois grands milieux que sont le médical, le social et le médico-social et pour accompagner tous les publics. Il peut s’agir de structures médicalisées, en collaboration avec des équipes pluridisciplinaires médicales. Nous sommes également à même d’intervenir dans des structures d’urgence pour des personnes SDF, en EHPAD, en ESAT (Établissement et Service d’Aide par le Travail), des réfugiés, etc. Cela m’a ouvert un champ des possibles incroyables. Une partie de ma formation a été à l’époque prise en charge par la Fondation L’Oréal. En échange, je m’engageais à travailler pour la marque pendant trois ans, en étant rémunérée : une véritable opportunité !

Des stages enrichissants

J’ai suivi plusieurs stages dans le cadre de ma formation au CODES.

Avec une socio-esthéticienne à Lille

J’ai pu découvrir la socio-esthétique en maison d’arrêt, en service d’oncologie en hôpital et dans un centre social avec des personnes en recherche d’emploi. Je savais que c’était ça que je voulais faire : travailler sur plusieurs lieux.

En autonomie

On nous a également demandé d’organiser un stage libre de trois semaines, dans un lieu où la socio-esthétique n’était pas mise en place. Je suis donc intervenue dans différents centres sociaux grâce au CCAS de la ville de Chatou : au club sénior, à l’épicerie sociale de la Croix-Rouge, à l’association d’aide au retour à l’emploi, etc. Au club sénior par exemple, j’ai mis en place des ateliers collectifs autour du soin de la peau et des mains, pour créer du lien entre les femmes et stimuler leur envie de prendre soin d’elles. Je conseillais également ces femmes sur leur tenue vestimentaire car certaines souhaitaient rester à la mode tout en respectant leur âge, mais elles ne savaient pas nécessairement comment s’y prendre.

Un emploi du temps partagé

À l’issue de ma formation, j’ai continué à intervenir pour le CCAS de Chatou qui m’a également sollicitée pour les maisons de quartier de la ville et au club ados. La socio-esthétique permet notamment de contribuer à l’acceptation des changements corporels (image du corps et de soi perturbés) de l’adolescence. Je travaillais en parallèle régulièrement pour La Roche Posay, marque du groupe L’Oréal. Je faisais du maquillage correcteur, j’accompagnais les femmes pour pallier les toxicités cutanées des traitements oncologiques, etc.

Le socio-conseil en image

Dans la cadre de ma formation au CODES, un module d’initiation au conseil en image était proposé : une révélation ! Parfois, on ne peut pas d’emblée proposer un toucher relationnel à certaines personnes fragilisées. La peau étant une base de différenciation et de construction du «moi». Dans ce cas, on peut entrer en lien par le biais de l’image extérieure projetée, au travers de conseils vestimentaires par exemple. Cela peut ensuite ouvrir la porte vers le contact de la peau et donner accès à cette relation «plus intime». À l’issue de mon diplôme de socio-esthéticienne, j’ai souhaité approfondir mes connaissances en conseil en image, et j’ai obtenu mon certificat de coach en image à l’IDRI en 2015, à Paris.

Je crée ma société

J’ai créé ma société Corps Or Donner en août 2014. Je me présente depuis en tant que socio-esthéticienne et socio-conseillère en image. En fonction des différents publics, je commence soit par le conseil en image pour aller vers la socio-esthétique ou inversement. Cela me permet d’être plus globale dans ma prise en compte et mon approche.

Travailler avec les migrants et les réfugiés

J’ai commencé à travailler en 2015 au sein du CADA (Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile), de Nanterre où j’avais déjà effectué un stage.

Un accompagnement et des soins bénéfiques

J’accompagnais ces hommes réfugiés, qui avaient connus un parcours migratoire, sur l’aspect de l’intégration sociale et l’insertion professionnelle au travers du socio-conseil en image.

Ce projet m’a tellement tenu à coeur que j’ai demandé un soutien de la Fondation L’Oréal. Nous avons obtenu le prix Première Chance pour développer la socio-esthétique dans cette structure.

J’ai pu ainsi leur prodiguer des massages relaxants pour améliorer la qualité de leur sommeil, des soins de peau adaptés à leur nouvel environnement (eau plus calcaire, manque de soleil, alimentation différente, etc.) ou des soins des pieds, fatigués du voyage et pas habitués à être contenus dans des chaussures fermées. J’ai également beaucoup travaillé sur l’ancrage avec des massages des pieds car beaucoup se sentaient déracinés.

L'importance de varier les structures

C’est un métier qui peut être lourd. On est face à la maladie, à du malêtre ou encore à de la précarité. Le fait de pouvoir partager ma semaine en intervenant sur plusieurs types de structures me permet de prendre du recul. De plus, je n’aime pas la routine, j’ai donc bien fait !

Le travail avec les jeunes

En rupture avec les études

On m’a ensuite contactée pour travailler à l’École de la Seconde Chance à Clichy et à la mission locale de Saint-Germain-en-Laye. La difficulté d’intervenir auprès des adolescents est due à leur âge. Ils revivent la quête identitaire vécue pendant l’enfance. J’ai eu des missions dans plusieurs foyers de jeunes travailleurs également. Mes ateliers collectifs permettaient à ces jeunes en rupture scolaire ou en recherche d’emploi de recevoir des conseils personnalisés sur les codes vestimentaires professionnels et d’améliorer leur présentation physique favorisant leur chance de réussite.

Malades à l'hôpital

J’ai commencé à travailler à l’Hôpital Necker en janvier 2018, pour la Suite Necker. Cet espace est dédié à la transition entre l’hospitalisation pédiatrique et l’hospitalisation adulte. Il s’agissait d’enfants souffrant de maladies rares et chroniques et, pour lesquels, nous savions qu’ils seraient encore malades à l’âge de 18 ans. Avec une conseillère d’orientation, une psychologue, une gynécologue et conseillère sexuelle, une professeure de sport, une enseignante de méditation, des praticiens shiatsu, une conseillère en image et moi, socio-esthéticienne, nous les préparions à s’autonomiser sur le prendre soin de soi en améliorant l’estime et la confiance en soi.

Des soins pour le mieux-être

J’intervenais dans tous les services comme dermato, pneumo, gastro, mais aussi dans des services plus protégés comme les chambres stériles pour les enfants qui venaient de recevoir une greffe de moelle osseuse par exemple. Souvent, j’étais sollicitée par l’équipe soignante pour soulager la douleur. L’objectif principal était de les apaiser et les aider à se sentir mieux dans leur peau et dans leur corps, afin de se sentir mieux dans leur tête. Au travers de massages détente et notamment du Nursing Touch, que j’ai appris au CODES, je leur offrais des instants de reconnexion à leur corps aimant et pas que souffrant… Le toucher devient alors un outil de médiation corporelle. D’autre part, mon rôle était également de prodiguer des conseils adaptés face aux impacts cutanés que peut entraîner la chimiothérapie notamment.

Balance ton style !

Aujourd’hui, toujours en partenariat avec la Suite-Necker et, en collaboration avec une styliste médicale, un photographe de mode et une couturière, j’interviens pour animer des ateliers «Balance ton Style». Je prodigue des conseils vestimentaires à des jeunes en situation de handicap ou avec des dispositifs médicaux. Notre but est de leur offrir la possibilité d’être habillés comme les jeunes de leur âge en réadaptant les vêtements à leurs contraintes/besoins.

Formatrice et socio-esthéticienne

Depuis 2017, j’enseigne au sein du CODES à Tours, à coeur de transmettre mon savoir-faire. Je forme également au socio-conseil en image les futures socio-esthéticiennes dans plusieurs écoles françaises.

Message aux esthéticiennes

La beauté inclusive est selon moi le futur pour les esthéticiennes et l’une de mes valeurs essentielles ! Se former à accueillir au sein de son centre de beauté des personnes ayant eu un cancer ou en situation de handicap physique, permet de poursuivre les accompagnements que nous, socio-esthéticiennes, pouvons mettre en place au sein des structures. La plupart des patients ont envie d’avoir accès, comme tout le monde, à des soins esthétique, à côté de leur domicile.