Décryptage du décret sur l’IPL et le laser

C’est une excellente nouvelle et, forcément, au regard de la rentabilité et des résultats, ça donne envie de s’équiper. Mais attention, il y a des règles très strictes à respecter pour pratiquer en toute sérénité. Thomas Gruot, technicien et responsable du développement dans les appareils esthétiques et médicaux depuis plus de 20 ans et aujourd’hui directeur technique de Keros Technology, vous éclaire sur toutes les subtilités de ce décret.

Le décret n° 2024-470 relatif aux actes d’épilation à la lumière pulsée intense et au laser à visée non thérapeutique est donc actif depuis le 25 mai dernier. Ce décret de quatre pages est composé de onze articles. Il est accessible sur le site www.legifrance.gouv.fr. Ce décret valide l’utilisation du laser et de la lumière pulsée exclusivement aux médecins, aux infirmières et aux esthéticiennes diplômées bien entendu.

LES RISQUES ENCOURUS

Attention à bien respecter le décret, s’il n’y a pas de risque pénal, il peut y avoir des sanctions administratives :

- ne plus pouvoir utiliser l’appareil durant une période de six mois à cinq ans.

- des amendes administratives de 37 000 € si vous êtes un entrepreneur indépendant jusqu’à 150 000 € si vous êtes une société.

Donc, ce n’est pas sans risque de proposer ce type de prestation si vous ne suivez pas parfaitement le décret.

De l’épilation définitive uniquement

Attention, le décret ne vous autorise qu’à faire de l’épilation définitive ou du photo-rajeunissement avec la lumière pulsée. Ne vous lancez pas dans du détatouage ou du carbon peel. Vous n’en avez absolument pas le droit, cela serait considéré comme exercice illégal de la médecine.

LES OBLIGATIONS

Vous avez des obligations :

- Formation

- Enregistrement

- Communication

- Préconisation

- Validation

- Entretien

LA FORMATION

À l’heure où nous écrivons cet article, le sujet de la formation est en cours d’écriture. C’est encore le seul point d’interrogation que nous avons sur le décret.

LA FICHE INFORMATIVE

Art. D. 1151-4 «Au plus tard avant le premier acte d’épilation, l’exploitant remet ou fait remettre au consommateur une fiche, rédigée dans des termes compréhensibles du public, qui comporte notamment :»

Cette fiche est capitale, sachez que c’est la première chose, dans le cadre d’un contrôle, que l’agent va vous demander. Vous devez préparer cette fiche, l’éditer et la donner à votre cliente qui doit la valider et la signer.

Le décret ne vous autorise qu’à faire de l’épilation, pas du détatouage ou du carbon peel

Le contenu de la fiche informative

- Les informations sur les cas particuliers : vous devez indiquer les variations de résultats entre les phototypes de peau, les types de poils (couleur et taille) mais aussi les zones plus ou moins simples à traiter ainsi que les éventuelles contre-indications. Attention, soyez parfaitement explicite pour limiter les contestations de vos clientes.

- La notion de résultats : vous devez dire à votre cliente ce qu’elle peut attendre comme résultat de l’épilation définitive : en combien de séances est-ce que ce sera durable ou pas durable ? Est-ce qu’il faudra revenir ? Faites bien attention à ce que vous indiquez dans ce document car si les résultats ne sont pas à la hauteur de ce que vous avez avancé, votre cliente aura un document pour se retourner contre vous.

- Les risques doivent être listés : rougeurs, brûlures, dépigmentation… Tout cela doit apparaître avec tout ce que vous avez mis en place en termes de sécurité pour traiter ce type de risque. Voici ce que dit le décret «Il faut que ce soit clair et explicite à la compréhension de tout le monde».

- Les informations sur la formation : précisez que vous avez bien été formée à l’utilisation du laser.

- Le médecin : il est aussi obligatoire de noter qu’il est recommandé de voir un médecin avant le traitement pour faire un bilan.

- Toutes les contre-indications : soleil, médicaments, pacemakers… ces paramètres qui rendraient le traitement plus compliqué ou impossible doivent être listés. En cas de doute, votre cliente doit se rapprocher d’un médecin.

- La partie oculaire est vraiment la partie la plus sensible lors d’un traitement laser, il faut rappeler qu’elle doit être parfaitement protégée. Je vous conseille d’opter pour des lunettes totalement occultantes.

- Les effets secondaires : c’est une nouveauté pour les instituts de beauté, il faut bien expliquer à votre cliente comment elle pourrait signaler un éventuel effet secondaire.

Cette fiche doit être signée par votre cliente et vous devez en conserver un double pendant trois ans.

LES AFFICHAGES

En complément de la fiche, vous devez avoir dans votre institut des affichages où l’on retrouve l’importance de la protection oculaire, tous les risques de santé et les contre-indications, la recommandation de faire appel à un médecin, la procédure à suivre pour signaler un effet indésirable et mettre aussi en avant les traitements. Ces points seront immédiatement contrôlés par l’agent.

LES ANALYSES AVANT ET APRÈS LA SÉANCE

Le contrôle de l’aspect cutané : il est demandé par le décret. Je vous invite à avoir les protocoles les plus cadrés possibles pour être irréprochable.

Le contrôle du paramétrage : il s’agit de revoir toutes les contre-indications et régler l’appareil par rapport à l’instant du traitement.

Après la séance, il y a un nouveau contrôle pour vérifier qu’il n’y a pas eu d’effets indésirables sur toutes les zones que vous aviez étudiées avant la séance.

L’importance des contrôles

Obligation pour le laser et non pour l’IPL : vous devrez conserver la preuve de toutes ces vérifications, de tous les traitements que vous ferez sur toutes vos clientes, il faut donc que vous ayez un fichier irréprochable, bien rempli. Finalement, ce document où tout est noté avant et après la séance est une fiche de suivi de traitement et c’est sans aucun doute l’un des documents qui vous sera demandé en cas de contrôle.

L’épilation définitive est un marché ultra-porteur et ultra-rentable

LA DÉCLARATION DU PROFESSIONNEL

Les remontées des effets indésirables

En tant que professionnelle, vous avez une double obligation en cas d’incident, d’effet indésirable :

- faire une déclaration auprès du gouvernement,

- faire une remontée auprès de l’usine qui fabrique l’appareil pour qu’elle puisse exercer son activité de surveillance.

En cas d’incident, vous devez être mesure de prouver que vous avez fait le nécessaire.

Votre cliente doit aussi avoir la capacité de faire cette remontée d’un effet indésirable. Ça peut être un petit effet comme des rougeurs, des boutons ou ça peut être beaucoup plus problématique comme des brûlures plus ou moins profondes ou de la dépigmentation.

La traçabilité de l’entretien des appareils

Vous avez l’obligation de suivre les recommandations d’entretien de l’usine et vous devez être en mesure de présenter aux agents de contrôle la preuve que l’appareil est bien entretenu en temps et en heure par rapport à ce que l’usine demande. Si l’agent de contrôle arrive et constate que votre appareil a six mois de retard par rapport à l’entretien, il est tout à fait en capacité de vous interdire d’utiliser votre appareil le temps qu’il passe en entretien.

L’entretien de la machine

On peut s’attendre à devoir faire des petits entretiens tous les un à six mois, c’est vous qui les ferez. Des techniciens devront aussi se déplacer pour contrôler la machine entre 12 et 18 mois.

La présentation des preuves

Ce n’est pas trop votre sujet, cela concerne le distributeur qui a l’obligation de vous présenter l’appareil, son utilisation et ses spécificités techniques. Vous, vous devez être en mesure de prouver que vous avez bien eu ces informations.

Ce décret est une excellente nouvelle, il vous fait passer dans le domaine du paramédical

Les notices de déclaration

Votre distributeur doit donner toutes les notices mises à jour, ainsi que les informations pour faire une déclaration auprès de l’usine.

LES CONTRÔLES VONT ARRIVER !

Ce décret est une excellente nouvelle, il vous fait passer dans le domaine du paramédical et les contrôles seront différents. Entretenez bien votre appareil, faites bien toutes vos déclarations, informez vos clientes et soyez irréprochable dans vos protocoles, rajoutez des barrières de sécurité. Les contrôles vont arriver, c’est une absolue certitude. Ces dix dernières années, les contrôles étaient rares car le décret allait sortir. Mais, maintenant que le décret est sorti, les contrôles vont avoir lieu.

MES CONSEILS

- Orientez-vous toujours vers un appareil qui a le CE médical, c’est plus fiable, plus sécurisé, plus performant, plus durable.

- Pour connaître la qualité de votre appareil, il y a deux astuces :

• les études cliniques : s’il n’y a pas d’études, il y a moins d’expertise,

• la certification Qualiopi qui vous assure de la qualité de la formation.

- L’appareil, c’est bien, mais le prestataire, c’est presque encore plus important ! Choisissez un prestataire qui a des compétences dans la distribution du matériel médical. Commercialiser du matériel médical n’est absolument pas la même chose que commercialiser du matériel esthétique, ce ne sont pas les mêmes normes, les mêmes obligations, les mêmes enregistrements…

- Le laser n’est pas une lumière pulsée, ce n’est absolument pas comparable, ça ne fonctionne pas de la même façon. Je vous invite à sélectionner un distributeur qui est compétent dans le laser depuis au moins deux ans.

- Ne faites jamais de balayages, vous aurez de moins bons résultats et beaucoup de soucis après.

- Une nouvelle technologie laser est apparue il y a peu, le multiwave. C’est un pur argument marketing qui fonctionnera toujours moins bien qu’une technologie monowave.

À RETENIR

Ce décret est un pas gigantesque dans le monde de l’esthétique.

La reconnaissance du professionnalisme des esthéticiennes

Grâce à ce décret, l’esthétique entre vraiment dans la notion de «paramédical», on le voit dans d’autres pays, il y a une vraie reconnaissance dans la capacité technique des esthéticiennes à utiliser des technologies dites compliquées, plus risquées auprès des clientes.

Ne passez pas à côté de cette opportunité

Aujourd’hui, l’épilation définitive est un marché ultra-porteur et ultra-rentable pour les instituts de beauté avec des taux horaires entre 150 et 200 €. Ce marché va se développer dans les cinq, dix prochaines années, penchez-vous sur le sujet, c’est le bon moment !

Soyez irréprochable !

Vous devez vraiment être irréprochable sur le choix du distributeur, de l’appareil et dans les protocoles parce que les contrôles vont arriver, ce serait quand même malheureux, pour avoir économisé quelques euros ou pour avoir fait confiance trop rapidement, que l’agent vous dise : «Pendant six mois vous n’allez plus pouvoir utiliser votre appareil». Et pendant ces six mois, l’institut tourne, les clientes sont insatisfaites et surtout, les protocoles n’étant pas faits, les résultats seront moins bons.

CONCLUSION

C’est un très grand pas. C’est une chance de grande rentabilité, c’est une reconnaissance mais que cela soit au niveau des contrôles, au niveau de la sécurité, au niveau de la rentabilité et surtout au niveau de la satisfaction clientèle, je vous invite à faire les choses le mieux possible !