Les vernis de plus en plus green .1

Si le vernis est un produit plaisir, c’est également un produit à la formulation dangereuse (qui contient des solvants inflammables et un explosif, à savoir la nitrocellulose) et pouvant avoir des conséquences néfastes sur notre santé (notamment des effets du type perturbateurs endocriniens œstrogéniques).

Des vernis à ongles éco-friendly fleurissent de plus en plus sur le marché, revendiquant chacun un certain nombre d’allégations SANS. La première certification de vernis naturels a vu le jour ainsi que de nouvelles tendances telles que les vernis Do It Yourself ou encore les vernis aux pigments végétaux.

Quand le vernis craque…

Au même titre que les soins cosmétiques, il y avait urgence à nettoyer les formulations de vernis à ongles pour les rendre de plus en plus «safe».

Car, pour répondre à des qualités de tenue, de séchage rapide, d’éclat des couleurs et de retrait facile, ils ont besoin d’un minimum de chimie (lourde), pas vraiment green.

10 qualités
Rappelons que pour être efficace, un vernis doit posséder un grand nombre de qualités (pas moins de 10 !) :
- un pouvoir adhésif important dont dépend une bonne tenue,
- une belle brillance,
- une facilité d’application,
- un temps de séchage rapide (2 ou 3 minutes),
- une bonne homogénéité,
- un pouvoir couvrant élevé,
- une souplesse et une élasticité permettant d’épouser les éventuelles modifications de la surface de l’ongle sans se craqueler,
- une dureté convenable pour résister aux chocs,
- une bonne résistance à l’eau et aux produits de nettoyage,
- une bonne stabilité (une sédimentation trop prononcée ou trop rapide est préjudiciable au bon respect du vernis et contraint l’utilisatrice à agiter fortement le flacon avant toute utilisation).

Les vernis à ongles considérés comme écologiques sont classés en fonction de la quantité de substances nocives absentes de leur formule

Les principaux composants

Pas étonnant dans ces conditions que leurs formules fassent appel à l’artillerie lourde. Parmi lesnombreux composants, on trouve notamment :

- Des agents filmogènes qui ont pour rôle de constituer la pellicule souple, brillante et non collante, qui sera fixée à la surface de l’ongle après évaporation des solvants et des diluants. L’agent filmogène de base utilisé est la nitrocellulose. Pour former un film de qualité, qui doit donc être continu, la nitrocellulose doit être dissoute dans un solvant compatible appartenant à la famille des esters ou des cétones. Les esters, méthyle, éthyle, butyle, iso-butyle, sont les plus largement utilisés, car ils permettent d’obtenir des mélanges dits «azéotropes» ayant des propriétés d’évaporation compatibles avec leur usage. Un séchage trop rapide conduit à des phénomènes d’écaillage. A contrario, s’il est trop long, cela conduit à un film trop mou susceptible de pelliculer, et marquant assez facilement,
- des plastifiants, des substances non volatiles, telles que le camphre ou le dibutylphtalate (DBP),
- des solvants tels que l’acétate d’éthyle et l’acétate de butyle, l’acétone ou le butanone,
- des diluants, tels que le toluène ou le xylène,
- des colorants, le plus souvent des colorants azoïques (CI).

Toutes ces substances sont loin d’être anodines et l’on sait aujourd’hui que le corps peut en inhaler ou en absorber. Fin 2015, une étude, menée aux États-Unis par des chercheurs de l’université de Duke et l’organisation EWG (Environmental Working Group), a montré qu’un ingrédient utilisé dans les vernis à ongles et soupçonné d’être perturbateur endocrinien, le triphenyl phosphate (TPHP), passait dans le sang. Après s’être fait les ongles avec des vernis en contenant, les participantes de l’étude avaient les urines sept fois plus chargées en diphenyl phosphate, le produit de dégradation du TPHP.

Le TPHP est fréquemment présent dans les formules des vernis à ongles en tant que plastifiant, pour rendre le produit plus souple et améliorer sa tenue. Les fabricants l’utilisent de plus en plus en remplacement du dibutyl phthalate, une substance dont de nombreuses études ont montré qu’il agissait, comme d’autres phtalates, d’un perturbateur endocrinien, et qu’il était toxique pour le système de reproduction. Mais l’alternative n’est peut-être pas plus sûre…

Au-delà des dangers potentiels (allergies, perturbateurs endocriniens…) de bon nombre d’ingrédients présents dans un vernis, l’accumulation des ingrédients d’un vernis peut entraîner un effet non négligeable, compte tenu du nombre d’ingrédients prohibitifs (jusqu’à plus de 30) présents dans les vernis.

Des formules qui font amende honorable…

Même si elles sont conformes à la réglementation européenne, les formules sont de plus en plus revues et corrigées par les marques afin de répondre aux inquiétudes croissantes des femmes (surtout les femmes enceintes). Certaines marques ont commencé à chercher des alternatives pour «nettoyer» leurs formules. D’autres lancent directement sur ce marché des vernis éco-friendly. Maintenant que l’on a de la couleur sur les ongles, on demande la main verte !

À l’heure où l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (alias ARPP) a mis à jour ses règles de déontologie en réglementant l’allégation du SANS, les marques de vernis éco-friendly rivalisent d’ingéniosité marketing pour proposer la formule free la plus optimale.

Ainsi, les vernis à ongles considérés comme écologiques sont classés en fonction de la quantité de substances nocives absentes de leur formule : ils portent ainsi un chiffre suivi de la mention «free» («sans» en anglais) :

Des vernis «14 free» sont apparus depuis peu sur le marché. L’innovation est faite sur les colorants. 

Les formules contiennent des pigments colorants 100 % végétaux, obtenus grâce à des extraits de plantes, fruits et légumes : radis, patates douces et baies de sureau.

Sont éliminés des formules : les colorants de synthèse, les colorants minéraux ainsi que les colorants d’origine animale (le fameux carmin, pigment rouge issu de la cochenille, Dactylopius coccus Costa, un insecte parasite de divers cactus.). Ces formules vegan séduisent un pourcentage grandissant de consommatrices, soucieuses du bien-être animal.

Des marques éco-friendly font également le choix de ne pas intégrer certains filtres solaires chimiques, tels que les benzophénones 1 et 3, l’étocrylène et l’octocrylène, qui permettent de garantir la stabilité des couleurs à la lumière. Ils sont suspectés d’avoir un effet perturbateur endocrinien. 

La plupart des marques green revendiquent des formulations composées de 70 à 85 % de matières premières bio sourcées renouvelables et d’origine naturelle. Que faut-il entendre par là ?

On parle de «bio sourcés» pour les ingrédients issus de la biomasse végétale tels que le manioc, le blé, le coton, la canne à sucre, le maïs ou la pomme de terre. Les ingrédients bio sourcés sont produits à partir de ressources renouvelables et non du pétrole, ce qui limite l’impact sur l’environnement. La biomasse est par ailleurs une source qui ne peut pas s’épuiser.

Il n’en demeure pas moins que les matières premières utilisées dans les formulations de ces vernis restent des matières extrêmement transformées.

Côté innovant, la marque Manucurist a lancé il y a peu «Green Flash», la nouvelle solution green au vernis semi-permanent. Formulé à partir d’ingrédients naturels bio sourcés jusqu’à 84 % (canne à sucre, manioc, maïs, pomme de terre, blé et coton), sans monomères sensibilisants (qui permettent la polymérisation sous Led) ni hydroquinone (interdite en cosmétique) et 9 free, il se réalise en institut ou chez soi, avec une lampe Led ou UV et tient jusqu’à 10 jours.

Son rendu est tout aussi nouveau. Plus d’effet plastifiant, il est aussi fin qu’un vernis.

C’est aussi pour cette raison qu’il se retire comme un vernis classique (au dissolvant sans acétone), un point important car c’est souvent lors de la dépose et du ponçage que la matrice de l’ongle souffre le plus.



Les substances qui posent problème
Si les marques ont choisi de faire une communication par le vide, c’est qu’il y avait urgence à les supprimer des formules. La preuve avec ces quelques exemples :
- Le toluène : ce solvant, irritant, peut provoquer des maux de tête et est nocif pour le fœtus, c’est un neuro-toxique susceptible d’attaquer le système nerveux. Il vaut mieux éviter de le respirer ! Certes, il se trouve en petite dose dans le vernis, mais les scientifiques craignent en fait l’effet cocktail ou d’accumulation dans le corps de ce type de substances. Les femmes enceintes doivent impérativement l’éviter.
- Le formaldéhyde : de la famille des COV (Composés Organiques Volatils), il est utilisé comme durcisseur dans les vernis à ongles. En plus d’être allergisant, c’est un cancérogène connu. Il peut par ailleurs provoquer des irritations de la peau, des yeux et des voies respiratoires.
- Le colophane : il s’agit d’un liant utilisé dans les vernis, obtenu à partir de la distillation de térébenthine. Il est allergisant et irritant.
- Le styrène : un perturbateur endocrinien, toxique et irritant, qu’il ne faut pas respirer, et qui est cancérogène. Il peut y en avoir des traces dans les vernis – parfois utilisé comme ingrédient, il est donc mentionné dans la composition.
- Le xylène : ce solvant peut provoquer des irritations aux yeux, sur la peau ou aux poumons, mais il a aussi un effet nocif sur le système nerveux.



Les formules vegan séduisent un pourcentage grandissant de consommatrices

Vers des formules soins

Au même titre que le maquillage, les marques de vernis éco-friendly enrichissent leurs formules avec des huiles végétales comme par exemple l’huile de jojoba ou de coco, pour protéger et nourrir les ongles secs et cassants. Ils peuvent également être enrichis en ingrédients fortifiants, nourrissants et hydratants (pro-kératine, oligo-éléments,…), qui remettent le soin au cœur de l’ongle.

- La gamme de vernis «So’bio etic natural» a enrichi ses formules d’huile de ricin, 
- Aroma-Zone de Lenstique pistachier, une résine appelée aussi «larme de cristal» pour la forme des gouttes qu’elle prend en tombant de l’arbre et qui permet de renforcer la kératine et donc de durcir et de fortifier les ongles, 
- la marque Manucurist d’extrait de bambou, riche en silice végétale…