Les entreprises face à la crise

Les 10 points clés de la crise

1. Le second confinement tente d’éviter la paralysie totale de l’économie…

Le nouvel épisode de confinement a, en première analyse, un impact atténué, comparé à celui du printemps. Le maintien de l’activité du commerce de gros change la donne pour l’industrie, qui ne connaîtra pas la même embolie des échanges avec les fournisseurs et les distributeurs que lors du confinement du printemps.

2. … Mais le second rebond sera plus dur

Le reconfinement intervient sur une économie convalescente et encore fragilisée. Si le soutien massif de l’État a amorti les problèmes de trésorerie à court terme, le bond de l’endettement des entreprises génère un fardeau de remboursement qui met l’ensemble des bilans sous pression.

Les entreprises entrent inévitablement dans une phase d’ajustement qui diffuse la crise de secteurs à secteurs. Si l’embolie du second confinement est moins violente, le nouveau rebond de l’économie butera sur de bien plus graves séquelles sur l’emploi, les revenus des ménages, et un passif financier désormais trop handicapant pour nombre d’entreprises.

3. Une profonde cicatrice financière

Avec le soutien des banques via le canal du crédit bancaire, les entreprises se sont retrouvées, en septembre, avec 25 points de valeur ajoutée de dette supplémentaire.

Et le reconfinement va majorer de 5 à 10 points le ratio d’endettement. Or, l’échéance de remboursement de ce passif peut être étirée au mieux jusqu’à 5 à 6 ans.

Dans le meilleur des cas, cette charge nouvelle de remboursement représente ainsi 5 à 6 % de valeur ajoutée des entreprises. À quoi il faut ajouter la charge des dépenses différées : au 15 octobre 2020, la dette sociale des entreprises était de 23,8 milliards et la dette fiscale de 3 milliards.

4. Aucune bouffée d’oxygène du côté des prix

Les pressions à la baisse des prix, déjà à l’oeuvre avant la crise, se renforcent depuis, et cela fait maintenant plusieurs mois que l’inflation est tombée à zéro. Alors que le pouvoir d’achat est malmené, les distributeurs n’ont d’autres choix que de se lancer dans une guerre totale pour maintenir leurs parts de marché.

5. Des politiques de stabilisation rapides

Les projections de perte de croissance et d’ajustement de l’emploi demeurent très en deçà des ordres de grandeur que les organismes internationaux et le gouvernement projetaient en avril.

Le rappel de ces premières évaluations surligne le fait que les économies avancées ont démontré des capacités de résistance et d’adaptation des acteurs privés sous-estimées par les modèles économiques.

Les délais de mise en oeuvre des dispositifs de chômage partiel et de prêts garantis notamment sont remarquablement courts.

6. La peur de l’effondrement économique et social

Les fermetures réglementaires créent des distorsions de concurrence difficilement réversibles. Les parts de marché prises par exemple par le e-commerce, les plateformes en ligne ou par les grandes surfaces généralistes laisseront des traces.

À cela s’ajoute la cicatrice sociale d’un état de sous-activité profond et prolongé.

Entre le chômage partiel qui s’éternise, l’entrée dégradée sur le marché du travail de deux générations successives de jeunes diplômés et le nombre d’indépendants en précarité extrême, le tissu social est ébranlé.

7. L’emploi craque mais ne rompt pas

Bonne nouvelle, jusqu’ici, l’emploi flanche mais ne rompt pas. Son ajustement demeure très en deçà de ce que supposerait la réponse spontanée au choc d’activité subi par les entreprises, du fait notamment des dispositifs de soutien publics. Et la vitesse de reconstitution de l’emploi durant le rebond du troisième trimestre peut surprendre.

La hausse des contrats courts (CDD et intérim) au troisième trimestre a permis une reconstitution de près de la moitié des effectifs perdus dans la sphère privée.

8. L’appauvrissement des ménages

Le choc sur le pouvoir d’achat est violent mais il est concentré sur une partie seulement de la population. Une part importante des ménages échappe en effet aux ajustements sur leurs revenus.

Mais il ne faut pas croire que cela reste circonscrit aux seuls concernés. Le climat anxiogène pétrifie toute la population, et même celle qui est à l’abri anticipe des jours difficiles. Finalement, c’est quasiment tous les ménages qui se mettent en mode défensif.

9. La désynchronisation des économies du globe

Le coup d’arrêt des échanges internationaux constitue un facteur persistant de freinage de l’activité. Nous estimons que le retrait des marchés à l’exportation français atteindra 10,5 % au second semestre, après un effondrement de 23 % au premier, par rapport au même semestre de l’an dernier.

10. Une longue récession

Le rebond mécanique de l’après-confinement va prendre du temps. Le profil observé jusqu’en octobre a bien validé l’idée selon laquelle les 4 à 5 points qui séparent le PIB de son niveau d’avant crise seraient les plus difficiles à regagner.

Le nouvel épisode de confinement aggrave et décale, mais ne modifie pas sur le fond ce diagnostic.

Notre scénario central se dégrade par rapport aux projections de l’été. Il s’établit à -9,9 % en 2020 et +7,0 % en 2021.