La grande étude de l'esthétique (2)

Conférence présentée par Laure Jeandemange et Doriane Frère au 52ème Congrès International Esthétique & Spa (avril 2023, à Paris)

Sur les deux dernières années, avez-vous suivi une formation (autre que celle de votre marque partenaire) ?

Sur la totalité du panel de notre étude, vous êtes près de 75 % à avoir suivi sur les deux dernières années une formation autre que celles dispensées par vos marques. Les formations que vos marques vous proposent sont très complètes sur leurs produits, on vous forme pour être opérationnelles. Mais il est nécessaire que vous suiviez des formations hors marques pour enrichir votre savoir et déve­lopper vos compétences techniques et pratiques. 

Vous êtes 98.5 % à affirmer que la formation continue est essentielle et pourtant vous n'êtes que 75 % à avoir suivi une formation ! Cela veut dire que vous savez qu'il faut le faire mais que vous ne le faites pas ! Attention à ne pas vous reposer sur vos lauriers... 

Combien de formations avez-vous suivi ces deux dernières années ?

Vous êtes 58 % à avoir suivi, sur les deux dernières années, 1 à 3 formations, et 20,5 % 4 à 6 formations. C'est super ! Parce qu'encore une fois, une esthéticienne qui performe est une esthéticienne qui se forme. Le marché et les tendances bougent continuellement, vous devez rester à la page pour répondre aux besoins de vos clientes toujours plus exigeantes ! Les formations qui ont le vent en poupe sont les soins visage manuels: kobido, facialiste, intrabuccal. Et vous avez toujours les massages. 

Quelles sont les compétences cabine que doit avoir une esthéticienne aujourd'hui pour avoir du succès ?

En termes de connaissances cabine, à vos yeux, plusieurs points font le succès d'une esthéticienne, avec dans l'ordre : 

- les connaissances techniques sur le fonctionnement de la peau à 69%, 

- la pose de diagnostic précis à 66,2 %, 

- et la dimension psychologique à 61,5 %. 

Cela signifie que sur tout le panel qui a été interrogé, vous avez été les ¾ à chaque fois à avoir coché ces réponses. Ce qui est intéressant dans ces chiffres, c'est la dimension psycho­logique qui ressort et qui se positionne comme une donnée «outsider» par rapport à la connaissance du produit ou la maîtrise des technologies. Peut-être serait-il intéressant de suivre une formation en ce sens, des bases en psychologie... 

Quelles sont les compétences gestion d'entreprise que doit avoir une esthéticienne pour avoir du succès ?

En ce qui concerne la gestion d'une entreprise, vous répondez que : 

- la communication à 85,9 %,

- le marketing à 64,6 %,

- la gestion économique de l'institut à 77,5 % sont les principales compétences nécessaires à la gestion d'une entreprise.

Aujourd'hui, votre activité ne peut être pérenne que si vous communiquez et cela est encore plus vrai avec la place des réseaux sociaux. Mais n'est pas créatrice de contenus qui le veut, n'hésitez pas à vous faire accompagner par d'autres professionnels si vous n'avez pas les compétences ou le temps de vous occuper de votre communication ou de votre marketing. En ce qui concerne les compétences liées à la gestion économique de votre institut, idem, n'hésitez pas à vous faire accompagner ou vous former. 

Communiquez efficacement 

Pour avoir une communication efficace : il faut qu'elle soit cohérente et professionnelle sur tous vos réseaux. En particulier sur les réseaux sociaux, à chaque post que vous faites, demandez-vous bien : «En quoi est-ce que cela va me rendre plus professionnelle (pas plus sympa­thique) aux yeux de mes clientes ?». Ne vous trompez pas, c'est votre professionnalisme qui fait la différence. Vos clientes vous adorent mais si à un moment elles n'ont plus de résultats, elles ne resteront pas... 

Sur quelles compétences cabine voudriez-vous évoluer ?

Vous êtes une grande majorité, 48,6 %, à vouloir acquérir des compétences sur une catégorie de soins bien spécifiques : les soins manuels visage. Il est vrai que les techniques du kobido, du gua sha ou du yoga visage sont de plus en plus tendances et surtout demandées par les clientes. Il suffit d'ouvrir lnstagram, les vidéos mettant en valeur les massages du visage ont le vent en poupe. Les clientes constatent que les résultats sont immédiats et l'intérêt est qu'elles puissent entretenir chez elles ces effets grâce, entre autres, au yoga du visage. 

Vous avez également cité les connaissances techniques sur le fonctionnement de la peau à 27 %. Aujourd'hui, vous avez envie non plus de traiter en surface, mais d'agir sur les causes, en profondeur. 

La maîtrise des technologies est également importante à vos yeux (29,7 % des réponses). Qu'il s'agisse de manuel ou de technologie, il y a un objectif clair : le résultat. 

Quelles sont les prestations que doit proposer impérativement un institut de beauté aujourd'hui ?

Selon vous, les trois prestations que doit proposer un institut sont les suivantes :

- à 87,4 % des soins du visage,

- à 66,2 % des soins du corps,

- et à 68, 1 % des épilations.

Vos réponses sont très diversifiées et dépendent de vos spécialisations à chacune.

Il y a quelques années, on aurait sans doute mis les épilations en première place. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. L'institut n'est pas tenu de proposer toutes les prestations. D'ailleurs, pour se libérer du temps, certains instituts n'hésitent pas à supprimer certaines prestations pas assez rentables. 

La percée du maquillage 

On peut remarquer une percée intéressante du maquil­lage pour 19,2 % des sondées. Il existe en effet de très jolies marques de maquillage, en particulier des marques biologiques qui rencontrent un beau succès en institut. 

Avec quels professionnels les instituts de beauté aurait tout intérêt à collaborer ?

Selon vous, une esthéticienne devrait collaborer avec : 

- un nutritionniste à 58, 1 %, 

- un dermatologue à 56 %, 

- et un médecin/chirurgien à 49,3 %. 

Lorsque nous échangeons avec des esthéticiennes qui ont déjà travaillé à l'étranger, on se rend compte que vos consœurs ont déjà une longueur d'avance à ce sujet. Il existe en effet à l'étranger des centres pluridiscipli­naires axés sur une ou plusieurs expertises. Des coachs sportifs, des professeurs de yoga, des masseurs sont ainsi amenés à collaborer avec des esthéticiennes.

Vous pouvez proposer ainsi à vos clientes une prise en charge holistique, au-delà du sur-mesure.

Collaborer c'est gagnant-gagnant! 

C'est une vraie tendance de travailler ensemble pour offrir à la cliente un maximum de résultats. Et c'est vrai que l'association avec un nutritionniste, compte tenu de l'expertise minceur que certaines esthéticiennes décident de développer, est pertinente par exemple. 

Certaines veulent rester seules... 

On peut remarquer qu'il y a quand même plus de 8 % des esthéticiennes interrogées qui ne veulent collaborer avec personne ! C'est surprenant sachant que les clientes sont très exigeantes, veulent des résultats et que les collabora­tions avec d'autres professionnels permettent d'atteindre rapidement de meilleurs résultats... 

Qu'est-ce que vous préférez dans votre métier ?

Ce que vous préférez dans votre métier, c'est faire plaisir à vos clientes à 38,5 % et ce, avant d'obtenir des résultats à 21,8 %. C'est beau! Vous nous le dites souvent, vos clientes viennent vous voir pour vous, pour qui vous êtes, votre accompa­gnement, vos mains en or. C'est ce qui leur fait plaisir et les fidélise. 

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez aujourd'hui ?

Les «fausses esthéticiennes» 

Presque à l'unanimité, 71,4 % des sondées confient que leur principale difficulté au quotidien est de lutter contre les non-professionnelles. C'est vrai qu'il y a de nombreuses spécialisations en esthétique qui sont accessibles sans passer de diplôme comme le stylisme angulaire, les prestations regard et la dermopigmen­tation. À défaut de ne pas pouvoir agir sur les lois qui encadrent votre profession, vous devez vous mettre en avant auprès des clientes pour faire la différence. Par exemple, sur l'accueil de votre page lnstagram, n'hésitez pas à vous présenter, expliquer vos spéciali­sations, et surtout indiquer vos diplômes. Beaucoup de clientes auront sans aucun doute bien plus confiance en une personne qui indique sa formation et ses diplômes. Distinguez-vous par votre expertise et vos connaissances théoriques également. N'hésitez pas à publier des posts qui expliquent le fonctionnement de la peau, les carac­téristiques d'une peau grasse, la biologie d'un ongle si vous faites du stylisme angulaire... 

Et aussi des professionnels d'un autre univers

Vous avez aussi des non-professionnels de l'esthé­tique qui vous prennent votre travail : les infirmières, les dermatologues, etc. Ce qui fait votre différence en tant qu'esthéticienne, c'est votre expertise de la peau, votre toucher et votre savoir-faire dans la prise en charge globale et bienveillante de votre cliente. Il faut claire­ment marquer votre différence sur ces éléments-là. 

La proportion élevée des taxes ressort à 49,3 %. Atten­tion aux tarifs de vos soins, sont-ils réellement rentables? Faites bien vos calculs avec toutes vos charges, vos consommables, augmentez ou supprimez les presta­tions qui ne sont pas rentables. 

La crise économique 

La crise économique ressort dans 47,3 % des réponses. Les clientes les plus touchées sont celles qui avaient les situations les plus fragiles. Elles ont moins, voire plus du tout les moyens de venir chez vous, forcément, vous le ressentez. L'idée est d'identifier le profil de votre cliente qui n'a jamais cessé de venir chez vous ... Quels sont ses besoins, ses envies ? Identifiez-les et communiquez sur les réponses que vous apportez. L'idée est de déve­lopper toutes ces clientes qui ont le même profil. Et puis, c'est un cercle vicieux: moins vous avez de clientes, plus vous freinez le développement de votre activité... 

Quel est l'élément déterminant du succès d'un institut de beauté ?

L'expertise est, selon vous, ce qui fait la réussite d'un institut à 38,6 %, quelle que soit la tranche d'âge, et c'est vrai. Les clientes aujourd'hui veulent des résul­tats. Lorsqu'elles viennent pour un soin du visage, elles veulent de la détente mais aussi et surtout repartir avec une bonne mine, les traits du visage détendus et une peau repulpée. Vous avez la chance d'avoir accès à de nombreuses spécialisations. Choisissez celles qui vous plaisent, vous n'en serez que meilleures dans la pratique! 

Une expertise, ça se paye ! 

Vous ne pouvez pas être douées pour toutes les prestations esthétiques. Identifiez celles que vous préférez et faites­en votre expertise. Formez-vous pour être encore plus expertes : faire la différence par rapport à la concurrence, attirer des clientes, leur offrir un maximum de résultats et augmenter les tarifs de vos soins. Une expertise, ça se paye. 

Les techniques de soins 

20,3 % mettent en avant les techniques de soins. L'année dernière, on parlait à peine du kobido et des facialistes, en un an, nous avons connu un véritable raz-de-marée de ces prestations qui sont devenues ultra-réputées grâce aux réseaux sociaux. Foncez ! À noter que la concurrence dont on parle pourtant beau­coup n'arrive qu'à 25,9 % dans vos réponses.