L'évolution de la beauté, du bien-être

J'ai commencé dans le journalisme au Japon en 1989 pour Vogue Homme International. Puis, j’ai travaillé pour CB News, pour le magazine Max, pour Votre Beauté et Cosmetique News où j’ai commencé la beauté. C’était un sujet qui ne m’intéressait absolument pas et que j’adore maintenant…

L'évolution de l'offre beauté

Surinformation VS désinformation

Je pense que ces dernières années, l’évolution de l’offre beauté est excessive, pléthorique. Je trouve que pour la consommatrice, c’est très difficile de faire des choix, parce qu’à la fois elle est sur-informée et en même temps désinformée, des a priori se créent et ont pour conséquences des actes d’achat irréfléchis. Prenons l’exemple des parfums, la consommatrice va penser que ce qui est naturel est mieux. Mais, sans savoir que les parfums «naturels» sont plus dangereux que les synthétiques, à cause de problèmes d’allergies. Mais l’a priori fait qu’elle se dit : «C’est naturel, c’est bon». Et bien, non.

La mise en avant du «sans»

En ce qui concerne les parabènes dans les produits de soin, je me souviens avoir discuté avec le responsable de la recherche d’une très grande marque de cosmétiques. Il m’a dit : «Si ça ne tenait qu’à moi, en aucun cas je n’enlèverais les parabènes. Je considère qu’ils sont plus fiables que d’autres conservateurs. Mais la consommatrice aujourd’hui ne veut pas de parabènes». Seuls trois parabènes ont été mis en cause sur les quatre-vingts parabènes existants…

Aujourd’hui, dans une parfumerie, la conseillère de vente propose un produit à la cliente et lui dit : «Il est sans parabène». La cliente lui répond : «Il y a quoi dedans ? Vous voulez me vendre un produit en me disant ce qu’il n’y a pas dedans. Moi, j’aimerais plutôt savoir ce qu’il y a dans le produit que je vais acheter !». Et là, la conseillère de vente est incapable de lui répondre. On lui a expliqué que c’était positif de dire : «Il n’y a pas de parabène». C’est un argument vente qu’on retrouve dans de nombreux secteurs. On nous propose un produit en nous disant ce qu’il n’a pas dedans ! On devrait plus s’intéresser à ce qu’il y a dans un produit.

L’évolution de l'offre bien-être

Je constate une grosse demande pour de la relaxation. Conséquence : il y a des propositions de toute part pour se recentrer, se reposer, réfléchir, souvent en groupe, comme si c’était une panacée. L’offre est pléthorique… Comment choisir ?

Une mini-formation pour devenir prof !

Le problème aujourd’hui est que n’importe qui, après avoir suivi vaguement une petite formation et fait trois stages, peut se considérer capable de prêcher la bonne parole et d’«embarquer» des clients vers le bien-être ! J’ai vécu sept ans au Japon, je constate à quel point tout est récupéré de l’Orient. Ces nouvelles pratiques me paraissent hyper marketées, sans véritable valeur. J’ai connu une femme qui travaillait dans le marketing chaussures, après une formation de quelques semaines elle donne des stages de yoga ! Et les gens suivent. Il y a quand même un côté très «mouton de Panurge». Ils ne se posent pas de questions pour savoir si une formation va être vraiment efficace. Ils pensent que s’ils payent pour un stage, ils vont revenir transformés !

Les tendances beauté

La principale tendance beauté est de se tourner vers le naturel et le bio. Mais certaines choses ne peuvent pas être bio par nature. Les marques essayent de donner à la consommatrice ce qu’elle désire, elles veulent la flatter, au point que ça en devient une dictature. L’autre grande tendance concerne le retour à la nature et la relaxation, la déconnexion. Nous avons vécu dans un période où on ajoutait. C’était toujours plus, plus de travail, plus d’argent, plus de loisirs, notamment de loisirs où on bougeait… Maintenant, tout le monde veut se déconnecter et avoir des moments où on ne fait rien, prendre du recul, se reposer, se relaxer, se débrancher du quotidien !

L’évolution de la beauté et du bien-être

Nous le constatons déjà les marques sont tous les jours plus nombreuses…

Aujourd’hui, n’importe qui peut lancer n’importe quoi, notamment des produits que l’on applique sur sa peau. C’est un peu fou…

L’effet des influenceuses

Je n’ai rien contre les influenceuses, mais elles donnent parfois des conseils dommageables. Vous connaissez sans doute cette influenceuse très connue, Enjoy Phoenix, qui prêche la bonne parole, de jeune à jeunes. Lorsqu’Enjoy Phoenix donne une recette de gâteau au chocolat et que le gâteau est immangeable, ce n’est pas très grave, les jeunes filles le jettent à la poubelle. Mais quand elle explique comment faire un masque avec de la cannelle qu’on applique sur la peau, il y a de forts risques de rougeurs importantes, parce que la cannelle est un allergène ! Évidemment, plusieurs jeunes filles ont eu un problème… On n’en meurt pas, mais il y a quand même une responsabilité de cette influenceuse… Dommage de ne pas avoir plus d’esthéticiennes comme influenceuses beauté car ce sont elles les expertes de la peau, non ?

Je trouve que les influenceuses nous tirent vers le bas, elles font des milliers de fautes d’orthographe, mais elles ont beaucoup de pouvoir. C’est la raison pour laquelle beaucoup de marques les suivent et les payent ! Un jour, je me suis retrouvée dans un voyage de presse où nous étions quatre journalistes et une instagrameuse. L’attachée de presse nous a dit que cette instagrameuse n’était pas payée ! Nous étions sidérées. Les journalistes beauté n’ont jamais été payées pour faire un voyage de presse ! L’influenceuse est généralement payée, elle, comment être objective alors ? Tout est donc biaisé. Bonne nouvelle, le public commence à comprendre que les influenceuses sont achetées.

Les innovations en beauté et bien-être

Je trouve qu’il n’y en a pas de spectaculaire. J’ai l’impression que c’est plus du perfectionnement.

Les soins et les médecins

C’est intéressant de suivre des marques faites par des médecins, des spécialistes de la peau. Je pense à Augustinus Bader qui a transposé son expérience médicale autour de la cicatrisation des brûlures dans une gamme de soin. Toutes les grandes marques aujourd’hui travaillent plus que jamais avec des spécialistes, des médecins, des chercheurs d’universités. On retrouve ainsi des applications à partir de découvertes sur les cellules souches aussi bien chez Lancôme que chez Dior.

L’alliance de la nature et de la science

J’apprécie aussi que la nature soit explorée davantage, elle a toujours été utilisée de façon empirique depuis des siècles, mais si on ajoute la science, cela apporte une nouvelle dimension. Guerlain a sélectionné une orchidée «noire» (elle n’est pas noire, mais le mot fait rêver) qui vient de la Cordillère des Andes. La Recherche s’est rendu compte que cette orchidée pousse dans des conditions extrêmes, dans une région où le soleil n’arrive pratiquement pas. Guerlain a fait de nombreux tests et ses chercheurs sont arrivés à extraire de cette orchidée noire ce qui pouvait être intéressant pour la peau. Chanel s’est penché sur une fleur Iconique pour la maison, le camélia rouge. Dans sa nouvelle gamme de soin «N°1» figure un actif créé à partir d’une variété particulière de ce camélia très résistant et aux pouvoirs revitalisants remarquables, qui fleurit en hiver. Ces soins anti-âge conjuguent nature et science et une dimension quasi poétique s’invite également.