Créez votre marque de cosmétiques : du projet à la réussite !

Je gère un institut de beauté depuis une dizaine d’années. Il y a deux ans, j’ai créé la marque Terre Sensorielle, ma propre marque de cosmétiques. Pour cela, je suis repartie en formation en cosmétologie.

J’ai monté mon laboratoire et, aujourd’hui, je fabrique mes propres produits. J’ai fondé mon labo cosmétique.

D’abord, il faut savoir que créer et commercialiser une marque de cosmétiques nécessite de maîtriser de nombreux paramètres que vous n’avez pas forcément en tant qu’esthéticienne.

Je vais vous donner toutes les différentes étapes à aborder à partir de la feuille blanche, du projet jusqu’à la mise sur le marché de vos produits et la réussite.

Établir une stratégie marketing 

Avant toute chose, pour créer votre marque de cosmétiques, il y a un point important à maîtriser, c’est le marketing. Il faut que vous établissiez une réelle stratégie marketing. Cela veut dire qu’il faut connaître le marché, la concurrence mais aussi vos futures clientes.

Avant tout, commencez par faire une étude de marché pour pouvoir positionner vos produits.

Établir un cahier des charges 

Il y a aussi le choix des segments, c’est-à-dire sur quel segment vous voulez aller, une gamme de cosmétiques bio, naturels, ou plutôt conventionnels.

Ensuite, quelle est la gamme de prix et quel est le type de produits que vous voulez présenter sur le marché. Tous ces points sont vraiment importants avant de démarrer.

C’est le cahier des charges que vous allez vous imposer pour déterminer le marché que vous voulez prendre en termes de création de cosmétiques.

Établir un cahier des charges, c’est établir clairement vos objectifs et les résultats. C’est un outil qui va vous servir tout au long de l’étape de votre création de cosmétiques.

Vous allez choisir le nom de votre marque. Non seulement, il y a un produit, mais il y a une image de marque à mettre en place, une identité visuelle, un logo, etc. 

Vous partez vraiment d’une page blanche.

Vous allez choisir l’univers que vous voulez lancer : le choix de votre marque, des couleurs, de l’identité visuelle.

Vous pouvez vous faire assister par des agences de communication.

Il faut aussi que vous ayez une exigence en termes de produits, sur le marché, le choix de la gamme… Tout sera noté dans le cahier des charges.

Vous devrez aussi choisir le packaging, le type de contenant…

Concevoir les formulations 

Une fois que vous avez clairement défini votre étude de marché et que vous avez travaillé le côté marketing, vous allez vraiment entrer dans l’étape importante du sujet : le choix des formulations.

Créer votre marque de cosmétiques, c’est aussi choisir ce que vous voulez mettre dans vos cosmétiques : quels actifs apporter, quelles matières premières voulez-vous utiliser, une huile essentielle particulière, une matière première particulière ?

J’ai eu l’occasion de créer une gamme de cosmétiques au lait de chèvre.

Un éleveur de chèvres voulait lancer une gamme de cosmétiques à base de lait de chèvre, donc la matière première qui se retrouvait dans tous les produits, c’était le lait de chèvre, les cosmétiques, les savons, les douches, les shampooings, les crèmes de jour, les démaquillants, etc., tous contenaient du lait de chèvre.

Il faut vraiment que vous définissiez ce que vous voulez en termes d’actifs.

Une fois que ce travail est fait, il y a un gros travail à faire avec un formulateur, c’est-àdire celui qui va réaliser vos échantillons et ensuite vos produits. Il faut qu’il ait pignon sur rue avec un laboratoire pour créer les produits, c’est important.

Je voudrais faire un point sur les formulations.

Vous avez deux possibilités de formuler aujourd’hui :

- les formulations sur-mesure : vous créez votre propre marque et vous êtes responsable de vos propres recettes,

- la «marque blanche» : vous prenez une recette déjà existante et vous apposez votre étiquette. C’est possible de choisir cette solution avec les laboratoires et les coûts sont moindres parce qu’il n’y a pas toutes les recherches de formulation et de développement.

Faire tester les produits 

Une fois que ces formulations sont créées, vous allez commencer à réaliser des échantillons qui vont vous permettre de faire tester vos produits par un panel de consommateurs. Il vous faut donc choisir un panel de consommateurs, des cibles différentes et faire tester vos produits.

Je vous conseille de toujours faire des fiches tests pour avoir les retours et ensuite élaborer de plus en plus vos recettes s’il y a des modifications à faire.

Lancer la production 

Une fois que vos formulations sont clairement définies, vous pouvez passer à la production. C’est une étape cruciale. Les premiers produits sortent et vous arrivez presque à la finalité. Vous avez choisi vos matières premières principales, et tout ce qui est packaging, vous pouvez attaquer le travail de la fabrication.

Quand vous en arrivez là, vous devez tenir compte du processus de production et des temps de séchage si nécessaire avant de lancer la mise sur le marché.

La mise sur le marché 

C’est une étape importante puisque vous allez devoir chercher des clientes. Votre étude de marché avec son cahier des charges vous sera très utile.

Combien de temps cela prend entre le moment où on décide de créer sa marque et la mise sur le marché ?

Laetitia Chovelon

Il faut compter un minimum de six mois, à peu près, à un an. 

Est-ce que le coût varie selon le nombre de produits ? Est-ce qu’il y a un minimum de produits à commander ou un seul suffit-il ?

Laetitia Chovelon

Vous pouvez commander un seul produit mais, en général, si vous lancez une gamme de cosmétiques, c’est mieux d’avoir quelque chose d’assez complet.

Vous aurez toujours des coûts fixes pour les processus de formulation. Mais, le coût du produit dépend aussi de sa composition. Par exemple, les coûts des huiles essentielles peuvent varier du simple au double.

En ce qui concerne la marque blanche, est-ce qu’il y a plusieurs recettes ou une seule recette fixe pour tout le monde ?

Laetitia Chovelon

C’est une recette fixe qui a déjà été définie. Si vous voulez faire une marque blanche, le laboratoire va vous proposer peut-être 20 ou 30 produits mais vous serez obligée de choisir l’un d’entre eux.

Si vous voulez une crème de jour, le laboratoire vous proposera sa crème de jour, mais vous ne pourrez pas modifier la recette, sinon vous allez vers une création pure.

Est-ce que dans le cas d’une crème de jour, on peut avoir trois recettes différentes, et choisir celle que l’on préfère selon le parfum ou le composant ?

Laetitia Chovelon

Ça dépend des formulateurs et des laboratoires avec qui vous travaillez, certains en auront peut-être une centaine. Cela dépend des laboratoires avec qui vous allez travailler.

Établir le dossier d'informations produits 

Quand vous créez une marque de cosmétiques, vous avez des obligations. Ces obligations entrent dans les frais fixes, c’est ce qu’on appelle les DIP, dossiers d’informations produits.

En tant que créateur de votre marque, vous êtes responsable de la mise en place sur le marché de votre produit, donc le nom inscrit sur l’étiquetage est votre nom à vous et votre adresse à vous et pas celui du fabricant, donc vous êtes responsable de votre produit.

Le DIP, c’est la carte d’identité du produit. Elle contient de nombreux renseignements, dont tout ce qui est lié à la sécurité de la santé humaine, tout ce qui est lié à la formulation aussi bien qualitative que quantitative, et tout ce qui est informations telles que l’adresse.

Le DIP est réalisé par des évaluateurs de sécurité, des professionnels qui sont à même d’établir ce genre de document. C’est un dossier complexe de 20 ou 30 pages qui est établi pour chaque produit.

Si vous voulez vendre une crème de jour en format 50 ml ou 100 ml, il vous faut un seul DIP, quel que soit le contenant. En revanche, si vous changez le parfum de votre crème de jour, vous devez refaire un DIP. Donc, c’est important de bien définir votre recette.

Cette étape de formulation avec les tests et l’échantillonnage est importante et doit être bien définie dès le départ. Une fois que vous avez choisi votre produit, vous ne pouvez pas revenir en arrière, sinon vous êtes obligée de refaire un DIP et cela entraîne de nouveaux coûts.

Sur le marché, vous allez trouver de tout en termes de DIP, avec des montants qui peuvent aller de 150 € à 700 € par produit. Donc, si vous créez une ligne de cosmétiques de 20 produits, vous devrez faire 20 DIP. C’est un élément à prendre en compte, c’est très important.

La réglementation cosmétique 

En tant qu’esthéticienne, vous n’en entendez pas beaucoup parler mais le formulateur, lui, subit un règlement.

Il est valable dans toute l’Union Européenne. Par exemple, si l’on vend des produits qui viennent d’Europe, tout va bien, mais s’ils viennent d’un autre pays, comme de l’huile d’argan du Maroc, par exemple, il faut faire attention et vous soumettre au règlement européen.

Vous êtes responsable de la mise sur le marché de vos produits, donc c’est important de connaître le laboratoire qui vous les fabrique. Il existe un organisme, l’ANSM, qui s’occupe de tout ce qui est déclaration d’établissement.

Tous les laboratoires doivent être soumis à cette déclaration.

La réglementation cosmétique regroupe les DIP, l’ANSM, par rapport à la déclaration du laboratoire, les BPF (bonnes pratiques de fabrication). C’est très important, si vous voulez créer votre propre marque de cosmétiques, de savoir si les laboratoires sont bien aux normes avec la réglementation.

Vous devez aussi avoir un évaluateur de sécurité, lié à ces DIP. Et il faut tenir compte de tout ce qui est étiquetage et allégations cosmétiques.

Les règles d'étiquetage 

En ce qui concerne l’étiquetage qui est lié à votre produit, il y a des mentions obligatoires à mettre. En général, le laboratoire avec qui vous travaillez vous aide à faire votre étiquetage, même si vous faites appel à une agence de communication pour faire vos étiquettes, un logo…

Il y a des choses importantes à mentionner comme le nom ou l’adresse, les numéros de lots, les durées de conservation, ainsi que la liste des ingrédients au format INCI avec des termes scientifiques, et les allergènes qu’il faut mentionner.

Aujourd’hui, il existe 26 allergènes en France qui doivent être mentionnés. Tous ces éléments sont importants à respecter en termes d’étiquetage. La dernière chose à connaître concerne les allégations cosmétiques.

Souvent, on a tendance à aller très loin dans les allégations, donc faites attention, vous risquez d’être contrôlée.

Choisissez bien vos mots, ne dites pas que votre produit va résoudre des problèmes d’acné ou d’eczéma.

Les allégations concernent tout ce qui est vocabulaire, marque, image. Elles sont représentées sur l'étiquette et devront être respectées. Une réforme est entrée en vigueur le 1er juillet 2019, elle interdit dans les publicités les mots «sans» ou «zéro %».

Au lieu de dire que c’est «sans», il faut dire ce qu’il y a dans le produit. La réglementation bouge énormément, donc il faut la connaître au niveau création de cosmétiques parce que vous êtes responsable de votre produit une fois qu’il est mis sur le marché.

Qu’en est-il de la réglementation aujourd’hui sur l’utilisation des huiles essentielles ?

Laetitia Chovelon

La réglementation au niveau des huiles essentielles est encore très floue. Il faut les adapter en fonction de leur utilisation. Ainsi, vous pouvez ajouter une huile essentielle sur un produit de massage neutre, mais si vous faites beaucoup de massages dans une journée, vous l’avez sur les mains et votre corps est à saturation.

L’huile essentielle va dans le sang, ce n’est pas anodin. Il n’y a pas de réglementation stricte, c’est à vous d’être prévenante par rapport à ça.

Je croyais qu’il fallait être médecin ou pharmacien pour faire des produits cosmétiques, ce n’est plus d’actualité ?

Laetitia Chovelon

Non ce n’est plus d’actualité. Il y a quelques années, il fallait avoir un diplôme de chimie pour pouvoir fabriquer des cosmétiques. Aujourd’hui, tout le monde peut fabriquer ses propres produits et monter son laboratoire.

La seule condition à respecter, c’est de faire les DIP et de passer par un évaluateur de sécurité pour approuver la mise sur le marché du produit.

Conclusion 

Créer ma marque de cosmétiques a vraiment été une grande expérience. Pendant dix ans, j’ai été à mon compte en esthétique, j’ai travaillé pour de grandes marques, et à un moment, j’ai saturé et j’ai voulu me démarquer.

Créer mes cosmétiques moi-même a été un déclencheur, une plus-value. Je suis non seulement la créatrice de ma propre marque mais je peux fabriquer pour d’autres marques. Je suis là pour vous aider si vous avez envie de vivre cette aventure et vous démarquer.

En tout cas, c’est une très belle aventure et le message que je voudrais vous faire passer, c’est que c’est faisable. On m’a longuement démoralisée à me dire que je ne savais pas où je mettais les pieds et que c’était inaccessible.

Faux ! C’est un chemin à parcourir, mais c’est une belle expérience et ça mérite que vous vous lanciez !