Je suis devenue esthéticienne à domicile
Mes anciennes élèves plus que de simples élèves !
On pense souvent qu’enseigner est un métier facile et que l’on voit passer les élèves sans réellement s’en préoccuper. La réalité est pourtant bien autre. En tant qu’enseignant on a un contact privilégié avec nos élèves.
On les accompagne et on les aide à trouver leur voie professionnelle, on les voit grandir, rire, pleurer, travailler, baisser les bras, se relever... Avec le temps elles deviennent rapidement une partie de nous, de notre vie et on devient bien plus que de simples contacts professionnels.
On ne les prépare pas juste à un diplôme mais bien à un avenir et à une carrière professionnelle. Avec le temps, on passe du statut d’enseignant élève à celui d’ami.
Une relation qui peut certes parfois étonner mais une réelle satisfaction de pouvoir garder le contact avec ses «anciens bébés» et de les voir s’épanouir dans leur métier !
Pour cet article, je suis allée au contact de deux de mes anciennes élèves d’esthétique pour voir si la théorie s’applique réellement !
Voici donc deux d’entre elles qui ont passé leur BTS Esthétique avant la réforme en 2014. Pauline Benoit et Solène Micoud sont aujourd’hui esthéticiennes à domicile. Voici leur vision de notre métier !
Les études
Elles ont toutes deux passé leur CAP en candidate libre au cours de la 1ère année de BTS, un plus qui leur a permis de disposer d’un diplôme en esthétique. À la fin de leur 2ème année, elles ont passé la dernière session du BTS avant sa grande réforme.
Un stress supplémentaire car, en cas d’échec, le repasser risquait d’être assez dur avec la refonte profonde du référentiel d’examen. Au final, Pauline l’a réussi mais Solène l’a raté de très peu, notamment en raison d’une mauvaise note en arts appliqués.
Une réelle déception pour elle qui avait de grosses difficultés en scientifique et qui n’aurait jamais pensé rater le diplôme à cause d’une autre matière ! Ne voulant pas repartir de zéro avec le nouveau BTS, elle a préféré se mettre sur le marché du travail pour prétendre dans quelques années au BTS grâce à une VAE.
Pourquoi vous êtes-vous lancées dans l'esthétique à domicile ?
Pauline
«Après l’obtention de mon diplôme, j’ai travaillé pendant quelques années pour une marque de maquillage en tant que conseillère de beauté. Je travaillais dans un magasin mais rapidement la pratique m’a manqué.
En vente, j’ai eu l’occasion d’avoir affaire à une clientèle exigeante et qui ne me correspondait pas toujours. Ainsi, lors de la création de mon entreprise, j’avais vraiment envie de créer un concept qui me ressemble et avec une clientèle qui le comprenne !
J’ai beaucoup hésité avant de me lancer mais un jour je me suis dit : “C’est bon, il faut prendre les choses en mains et évoluer ! Il ne faut pas avoir peur de se lancer !”.
Même si j’étais quand même très stressée car je quittais un poste en CDI pour un monde totalement inconnu. Aujourd’hui, je ne regrette absolument pas mon choix !»
Solène
«Suite à mon BTS, je me suis mise à chercher du travail mais à chaque fois la réponse était la même : “Désolé, Mademoiselle, vous manquez malheureusement d’expérience malgré un profil intéressant”.
Au bout d’un mois de recherches infructueuses, j’ai décidé de prendre les choses en mains et de m’installer à domicile. Pour moi, il n’y avait pas de raison que je ne puisse pas y arriver et au moins j’allais pouvoir me construire ma propre expérience !
Me lancer à domicile a été une évidence car je n’avais pas beaucoup de fonds et je devais absolument dès le départ penser à mes charges ! Certes j’étais jeune et n’avais pas beaucoup de fonds au départ mais j’avais la volonté de réussir !»
AVEZ-VOUS EU DES DIFFICULTÉS AU DÉPART DE VOTRE ACTIVITÉ ?
Pauline
«La première difficulté a été rapidement d’arriver à me faire connaître et à créer une clientèle fidèle. J’ai dû investir dans un concept différent et miser sur la communication. J’ai fait le choix du «pop’art» pour ma charte graphique car cela me correspondait bien.
J’ai eu la chance de profiter des conseils et du talent d’un ami travaillant dans le domaine. Un vrai plus qui m’a réellement permis de me forger une identité graphique cohérente et professionnelle.
Il ne faut pas avoir peur d’investir un peu d’argent en communication lorsqu’on est à domicile et ne pas faire du «cousu main» qui n’a pas de sens !
Par la suite, mes difficultés ont rapidement été dans la gestion de mon quotidien. À domicile, on oublie au départ de l’activité, que dans le planning il faut gérer le temps des déplacements avec tout le matériel.
J’ai dû trouver des solutions de rangements optimales pour mes affaires pour aller vite mais aussi pour faire face aux charges lourdes !»
Solène
«La difficulté, c’est de se faire connaître car, comparé à un institut, nous, esthéticiennes à domicile, nous n’avons pas de vitrines pour nous mettre en avant. C’est là que commence le bouche-à-oreille, les réseaux sociaux, le site Internet, les Pages Jaunes et les flyers déposés dans les boîtes aux lettres et chez les commerçants...
Le plus important est alors de se créer un réseau pour trouver notre potentiel de clientes. Il ne faut surtout pas abandonner au début et laisser le temps à l’activité de démarrer !»
Aujourd'hui rencontrez-vous encore des difficultés ?
Pauline
«Le plus difficile aujourd’hui est d’arriver à faire face aux périodes creuses. À certaines périodes, c’est le «boom» intégral, je n’ai pas une minute à moi, j’enchaîne les rendez-vous pour ne pas décevoir les clientes fidèles qui comptent sur moi et les nouvelles.
Mais, à d’autres moments, c’est plus compliqué... Après plusieurs années, j’arrive mieux à gérer mon planning annuel me permet- tant de savoir quand prendre des vacances même si cela n’est pas toujours possible.
Ce qui est compliqué, c’est l’organisation même de notre métier. Avec le temps, la fatigue s’installe, notamment en raison des déplacements et du poids de tout le matériel. On sent rapidement que notre corps subit ce choix de vie, même si on aime notre métier et qu’on ne changerait pour rien au monde !»
Solène
«Aujourd’hui, même après cinq ans d’activité, pour moi, la principale difficulté reste de me faire connaître. Même si, aujourd’hui, j’ai un joli fichier clients avec des clientes fidèles, il ne faut jamais oublier de trouver de nouvelles clientes et de prospecter.
Il ne faut jamais rester sur ses acquis car on n’est pas à l’abri de perdre des clientes.
Certaines déménagent, certaines revoient leur budget beauté, d’autres encore finissent à la concurrence pour X ou Y raisons ! Si l’on s’arrête de prospecter, très vite on se retrouve avec de nombreux trous dans son planning.
Aujourd’hui, mon réseau de clientes est mon meilleur vecteur de communication, elles assurent mon buzz marketing et n’hésitent pas à parler de moi autour d’elles, c’est un réel plus pour mon activité et moi !»
Quels sont vos points forts et en quoi participent-ils à votre réussite ?
Pauline
«Mes points forts reposent sur ma personnalité, j’ai l’avantage d’être perfectionniste, un point important pour faire du travail de qualité dans notre milieu. J’aime le travail bien fait et je ne pars jamais de chez une cliente qui n’est pas satisfaite.
Rester sur une mauvaise note n’est pas dans mon concept, même si cela me demande une gestion parfaite de mon planning. Je préfère prendre moins de rendez-vous mais assurer une meilleure qualité et prendre le temps d’écouter mes clientes.
C’est un plus qui me différencie de certains de mes concurrents comme les instituts de beauté notamment en réseau qui sont pris par le temps et qui ont l’obligation de respecter des timings précis !
Autre point fort, j’ai su rester moi-même et garder mon naturel, ma franchise et ma positive attitude. Des atouts essentiels pour satisfaire mes clientes qui m’apprécient aussi beaucoup pour cela.
Avec moi, on ne broie pas du noir, on profite juste de l’instant, même si je reste consciente que tout n’est pas toujours rose !»
Solène
«Je suis assez maniaque et perfectionniste, ce qui est un réel plus dans notre métier. Ce côté-là de ma personnalité me permet de proposer des prestations de qualité tout en assurant une hygiène impeccable, même si je n’ai pas ma propre cabine.
Ce n’est pas toujours simple de gérer l’hygiène lorsque l’on va chez les autres, mais pour autant nous devons rester professionnelles et faire le mieux possible.
J’ai aussi l’avantage d’être patiente et à l’écoute de mes clientes, elles apprécient particulièrement ces traits de personnalité car elles peuvent tout me dire. Je suis leur confidente sans pour autant perdre mon côté professionnel.
Enfin, j’ai aussi un point fort qui est essentiel si vous voulez vous lancer à domicile : la ponctualité !
Certes, il peut y avoir des imprévus, notamment sur la route mais il ne faut pas que cela soit une habitude. Il faut être ponctuelle, c’est primordial. Je préfère même être en avance quitte à attendre un peu une fois arrivée proche de chez mes clientes.
Pour éviter les imprévus de la route, j’ai défini un rayon de déplacement de 15 km autour de chez moi ! Un argument qui peut parfois faire peur car on se dit que l’on limite volontairement sa clientèle, mais pour autant on garantit la qualité de ses services ! Un choix qui pour moi était évident !»
Vous faites beaucoup de formations, pourquoi ?
Pauline
«J’essaye de faire des formations deux fois par an, c’est primordial car nous sommes dans un secteur qui évolue beaucoup et qui se renouvelle en permanence. Se former est donc un moyen de s’adapter tout en satisfaisant nos clientes.
Hors de question pour moi d’avoir une cliente qui a vu une pratique intéressante sans que je ne puisse en parler avec elle ! Lorsque la technique me plaît et qu’elle correspond à ma clientèle, pas d’hésitation, je pars en formation et je l’intègre à ma carte de soins.
Mes clientes apprécient et me sont aussi fidèles pour ça !»
Solène
«J’essaie de me former à de nouvelles techniques deux fois par an pour toujours connaître et proposer de nouvelles prestations à mes clientes. Comme pour mon fichier clients, je considère qu’il ne faut jamais rester sur ses acquis. Les clientes sont très volatiles et la concurrence leur permet de l’être très facilement.
Ainsi, si je veux pouvoir les séduire, il faut que je leur propose régulièrement des nouveautés. La différenciation est un atout essentiel pour rester compétitif ! Mais hors de question de proposer des nouveautés sans formation, il ne faut pas faire n’importe quoi ! On ne connaît pas tout et il faut l’accepter.
Aller en formation, c’est vraiment l’occasion de faire le point et d’apprendre toujours plus. Un diplôme ne suffit pas. Depuis mon diplôme, j’ai déjà participé à une dizaine de formations professionnelles et je n’ai aucun regret !»
Comment choisissez-vous vos marques partenaires ?
Pauline
«Pour choisir mes marques partenaires, je cherche déjà des concepts qui pourraient plaire à mes clientes. Ensuite, je les essaye et si je suis convaincue je le leur propose. Les produits doivent être efficaces et me plaire, sans quoi je ne vois pas comment être crédible face à mes clientes.
Je partage beaucoup avec elles, donc pas question de leur proposer n’importe quoi. Après, je regrette un peu qu’il ne soit pas toujours simple aux esthéticiennes à domicile d’être en partenariat avec certaines marques.
Les ouvertures de compte sont souvent trop chères pour nous et peu de marques s’adaptent à notre mode de fonctionnement malheureusement !»
Solène
«J’ai testé préalablement sur moi toutes les marques que je propose à mes clientes. Je pars du principe que si j’aime un produit, je le partage. Néanmoins, trouver des marques partenaires n’est pas si simple lorsque l’on est à domicile.
Il y a encore peu de marques avec un bon rapport qualité/prix qui nous proposent des collaborations intéressantes.
Notre statut ne nous permet pas de faire des ouvertures de compte car cela représente de bien trop grosses charges. Nous devons donc faire le nécessaire avec ce que nous pouvons trouver d’accessible et surtout adapté à notre clientèle.
Pour ma part, mes clientes aiment les produits de qualité mais je ne peux pas me permettre de leur proposer des produits hors de prix !»
Comment jugeriez-vous la gestion de votre clientèle : difficile ou au contraire plutôt facile ?
Pauline
«On ne va pas se mentir, tout n’est pas parfait, certaines clientes sont parfois compliquées et les gérer me rappelle mon expérience en magasin. Mais pour autant, la plus grande majorité de ma clientèle est géniale, donc j’ai rarement à me poser la question.
C’est l’avantage du domicile, on rencontre énormément de personnes différentes et on peut aussi «choisir» ses clientes.
Néanmoins, toutes ces rencontres m’ont permis de rencontrer des personnes différentes et d’être de plus en plus ouverte sur le monde !»
Solène
«Mes clientes sont des amours avec moi, elles savent qu’elles peuvent tout me dire. La communication est très importante pour qu’elles se sentent bien et en confiance. Cette relation est un réel plus pour moi car cela me permet de mieux les connaître et de pouvoir répondre au mieux à leurs attentes.
La confiance est réellement la base de la relation client lorsque l’on est esthé- ticienne à domicile car, ne l’oublions pas, nous rentrons dans l’intimité de nos clientes en venant nous installer quelques heures chez elles, nous partageons leur maison, mais aussi parfois leur famille, leurs problèmes... Il faut savoir rester à sa place et surtout à l’écoute !»
Comment faites-vous pour lutter contre la concurrence ?
Pauline
«La concurrence est très rude en esthétique et je suis sur un secteur où je suis loin d’être toute seule. Pour moi, c’est pour cela qu’il faut se diversifier et savoir proposer des prestations différentes et novatrices. On peut ainsi s’adapter aux besoins de nos clientes mais aussi les surprendre !»
Solène
«Oui, aujourd’hui, il y a de la concurrence mais je pars du principe qu’il faut rester soi-même. Il ne faut pas rentrer dans une «guerre» avec ses concurrentes, il y a de la place pour tout le monde.
En effet, chacune propose un concept différent et a sa personnalité. On ne peut pas plaire à tout le monde et il est inutile d’essayer. Autant faire avec ceux qui nous apprécient et qui apprécient la qualité de notre travail !»
Quels conseils pourriez-vous donner à une personne qui voudrait se lancer ?
Pauline
«L’essentiel, c’est de foncer, n’écoutez pas les autres ! Forcément, on vous dira que le domicile, c’est dur, ça ne rapporte pas assez, il n’y a pas de clientes... blablabla !
Si vous le voulez vraiment, vous y arriverez, alors croyez en vous ! De plus, n’ayez pas peur de vous servir de votre réseau, c’est lui qui vous aidera à réussir.»
Solène
«Pour se lancer à son compte, il faut être courageuse, motivée et ne jamais baisser les bras : «Quand on veut, on peut !». Il y a des moments difficiles mais il ne faut rien lâcher. Je me suis lancée très jeune et sans réellement de fonds pour le faire.
À mes débuts, tout le monde était sceptique à cause de mon manque d’expérience. On n’arrêtait pas de me dire : “Va travailler un peu en institut avant pour te faire la main”, mais malheureusement je n’ai pas trouvé d’endroit qui veuille me donner ma chance, alors je me suis lancée et j’ai réussi.
J’ai créé ma propre chance et cela a fonctionné !»
Quelle est votre philosophie pour vous différencier de vos concurrents ?
Pauline
«Pour mon entreprise j’ai choisi un concept différent de beaucoup : j’ai choisi de ne pratiquer que des prestations que j’aime et que je maîtrise parfaitement.
J’ai réellement fait ce choix pour me spécialiser et être plus crédible vis-à-vis de mes clientes. Un choix qui peut surprendre mais qui fonctionne et qui me donne toute la confiance de mes clientes qui me sont très fidèles !»
Solène
«Ma philosophie repose sur ma personnalité et ma vision de la vie et du monde. Je travaille comme je suis et cette façon de faire me permet de me démarquer ! On n’aime ou on n’aime pas mais, comme je l’ai déjà dit, on ne peut pas plaire à tout le monde et il est inutile d’essayer.
Il y a de la place pour tout le monde, du mo- ment que l’on y croit et que l’on est motivé !»
Vos cours ont-ils été un plus pour vous ?
Vous imaginez bien la réponse de mes deux anciennes élèves à cette question. Elles ont reconnu que leurs diplômes avaient été fondamentaux.
Elles ont beaucoup appris et la matière qui leur a le plus servi dès le début reste la pratique esthétique bien sûr mais aussi tout ce qui concerne le management et la gestion.
Cela a été fondamental pour elles lors de la création mais encore aujourd’hui pour suivre leurs comptes et les résultats de leur activité.
Plus étonnant, car souvent les étudiantes en esthétique détestent le scientifique, elles ont reconnu toute l’importance de la cosmétologie et de la biologie dans leur activité du quotidien : «La cosméto, c’est le maillon fort de notre connaissance des produits, cela nous permet de bien choisir et de ne pas faire n’importe quoi».
Mais la biologie, c’est aussi un plus primordial : «Nous faisons beaucoup de prestations de stylisme ongulaire car c’est la grande tendance, nous nous sommes beaucoup formées mais notre connaissance de l’ongle, nous l’avons eue grâce à nos cours qui nous l’ont apprise. Des connaissances qui sont fondamentales sur le terrain !».
Vive la formation !
Au terme de ma rencontre avec mes deux anciennes élèves, je ne peux qu’avoir un regard admiratif sur leur parcours et être fière d’elles. Comme elles vous l’ont dit, n’ayez pas peur de prendre votre destin en mains et n’écoutez que vous.
Ne faites pas n’importe quoi pour autant et donnez-vous les moyens de réussir en proposant des concepts différents et surtout en vous formant.
Elles ont beaucoup insisté sur ce point : la formation c’est la clef de la réussite, c’est la clef de la différenciation, c’est la clef de l’évolution, c’est la clef de la pérennité ! À vous maintenant de tenter votre chance...