Comment gérer une conversation difficile ?

L’état d'esprit et le langage 

La première chose que je dois vous dire, c’est que les conversations difficiles sont une des sources principales de stress en France au travail.

Pratiquement, un Français sur deux au travail est concerné par une conversation difficile qui mène au stress.

Les thèmes de ces conversations difficiles sont l’organisation du travail, la relation hiérarchique, qu’elle soit horizontale c’est-à-dire avec les employés, ou verticale avec les clients.

Donc, ce qui est important de savoir et de mesurer, c’est comment gérer cette conversation.

- Premièrement, je vous invite à penser à votre état d’esprit et au langage. Quand on dit le mot conversation difficile, le mot «difficile» en soi-même est négatif parce qu’on pense à conflit, on pense à quelque chose de négatif, on pense à tension. Maintenant, si on va plus loin et si l’on étudie l’expression entière «conversation difficile», on s’aperçoit que ça peut être une perception et la perception n’est pas souvent nécessairement la réalité.

- Deuxièmement, une conversation difficile peut vous paraître difficile parce que vous n’avez pas assez d’expérience. Par exemple, moi, en ce qui me concerne, au bout de 20 ans d’expérience de conversation difficile, je trouve que je suis meilleure maintenant que je ne l’étais quand j’ai commencé.

Donc, avec l’expérience, vous acquerrez une certaine façon de faire, un certain savoir qui peut vous aider.

- Et le troisième point, ce sont les compétences, on va parler plutôt de l’écoute, de l’empathie, des qualités que vous avez et que vous pouvez mettre en avant, pour pouvoir gérer une conversation difficile.

Je vais vous demander de ne plus penser au mot «difficile» mais de penser simplement à ces mots : «OK je vais avoir une conversation», «Il faut que j’aie cette conversation avec mon employée, avec la réceptionniste».

Pensez dans un mode positif. Une pensée positive est très importante. Je vais vous inviter à changer votre perception et penser autrement.

Alors, au lieu de vous dire «Oh là là, aujourd’hui, j’ai rendez-vous avec Amélie, mon employée, avec qui j’ai un problème et je redoute vraiment cette conversation», posez-vous la question suivante : «Quelles opportunités cela va me donner aujourd’hui de parler avec Amélie ?».

Donc, au lieu de vous dire «Ça va être vraiment difficile», c’est «Quelles opportunités cela va me donner» et essayer de trouver des opportunités. Tout est dans le relationnel.

La deuxième question à vous poser est celle-ci : «Que puis-je accomplir ? Qu’est-ce que je veux accomplir dans cette conversation ?». L’objectif, c’est de ne plus avoir de difficulté avec cette employée. Que voulez-vous accomplir à la fin de la conversation, quel est votre objectif ?

La troisième question : «Que puis-je apprendre de ça ?» car, quand les gens ont une conversation difficile, on dit toujours que tout n’est pas noir ou blanc mais gris.

Vous avez toujours quelque part en vous un sens de responsabilité. Après tout, si les gens ont une perception d’un problème, peut-être qu’il y a une vérité dans ce qu’ils disent, donc écoutez-les, remettez-vous un peu en question aussi. C’est très important.

Effectivement, quelles sont les solutions possibles ? Dans toutes les conversations difficiles, on veut des solutions, c’est impératif. Donc, changez de perception tout de suite, posez-vous des questions qui sont positives, des questions qui vont vous enrichir.

Comment construire un message efficace ? 

Au cours des vingt dernières années, j’ai développé un modèle NP EVALUATE ELEVATE ACCELERATE, avec lequel j’ai eu de très bons retours avec mes clients et je vais vous faire voyager avec mon modèle.

Votre perspective

Dans toute conversation difficile, il y a deux personnes.

Vous avez votre perspective à vous et la perspective de la personne qui est en face de vous, ce sont déjà deux choses fondamentalement différentes car vous avez chacune votre ADN, il y a donc une différence.

Votre expérience

La première chose à laquelle il faut penser quand vous vous préparez à une conversation difficile, car tout est dans la préparation, c’est de commencer à penser à votre expérience.

Qu’avez-vous comme expérience qui pourrait vous aider dans cette conversation difficile, dans la problématique de cette conversation.

Il y a des thèmes qui vont ressortir, avec lesquels vous vous sentez plus à l’aise, donc vous partez déjà de votre expérience.

Les faits selon vous

La deuxième chose, ce sont les faits. Quand les gens ont une conversation difficile avec vous, quels sont les faits ? Que savez-vous de leur problématique ? Posez-leur un maximum de questions, des questions ouvertes sur les comment, quand, combien de fois.

Essayez vraiment au maximum d’avoir tous les faits sur la problématique qu’on vous pose.

Parce que vous êtes curieuse, vous voulez savoir jusqu’au fond des choses, absolument tout. Posez des questions sur l’heure «Est-ce qu’il y avait quelqu’un dans la salle ?», «Estce qu’il y avait quelqu’un à la réception ?».

Tout savoir est très important. Ça va vous permettre d’assimiler un certain nombre de points que vous pourrez peut-être utiliser quand vous aurez ensuite cet échange. Mais quand vous en êtes là, n’oubliez pas que ce sont les faits, selon vous. La personne va peut-être vous dire quelque chose de différent.

Soyez ouverte à ce qu’elle va vous dire et écoutez, c’est-àdire n’interrompez pas. C’est très dur quand vous savez que la personne vous dit quelque chose qui n’est pas forcément la vérité ou qui ne reflète pas la réalité.

Mais vous devez l’écouter, sourire, la respecter. Vous devez continuer à être positive, et à avoir aussi le sens de l’empathie.

Votre pensée

Votre pensée n’est pas la pensée de votre interlocuteur.

Votre cerveau va vous faire réfléchir à un certain nombre de choses qui ne seront pas forcément les mêmes que cette personne-là.

Si elle vient à vous avec une problématique, elle sera mécontente, en colère, frustrée, énervée, mais vous, vous ne serez pas comme ça.

Si vous faites l’effet miroir à être énervée, mécontente… alors là, il va y avoir une confrontation terrible. Il faut que vous preniez du recul et reveniez à l’écoute.

L’écoute est très essentielle.

Vos sentiments

Évidemment, lors d’une conversation difficile, vous n’avez pas forcément des sentiments positifs, mais il faut que vous preniez de la distance, cela vous permettra de mieux gérer ce que la personne vous dit.

Il faut toujours porter une paire de lunettes différente. Selon la problématique que l’on vous donne, mettez une paire de lunettes différente et essayez de vous mettre dans la position de la personne qui vous explique sa problématique. Et là, vous allez voir comment vous vous sentez.

Vos intentions

Évidemment, l’intention est de résoudre un problème, ce n’est pas de le nourrir. Quand la personne va avoir fini de vous expliquer les faits, vous avez peut-être une idée pour résoudre le problème, mais la personne a peut-être une autre idée pour résoudre ce problème.

Je vous donne un exemple récent. Une cliente a eu une infection suite à une épilation dans un institut de beauté et la gérante lui a proposé de lui faire 30 % sur sa prochaine épilation.

Imaginez la cliente qui n’était pas tellement en bon état, qui se sentait mal. Alors, là, il y a eu vraiment un conflit car la gérante n’a pas répondu aux besoins de sa cliente.

Lui proposer 30 % ne résolvait pas le problème de sa jambe. Il faut savoir écouter les gens, il faut trouver ce que vous pouvez faire pour vraiment aider.

Vos observations

Quand une personne vous pose une problématique, observez-la. C’est peut-être quelqu’un qui arrive avec des bagages, qui a peut-être une vie compliquée, essayez de repérer les non-dits dans son langage corporel, essayez de tout noter, elle est peut-être vulnérable.

Venir et oser parler d’une problématique la met peut-être dans une position vulnérable, ou même faible. C’est important de tenir compte de cela. Encore une fois, il y a vos observations, et il y a les observations de la personne en face de vous.

J’ai été témoin dans un institut de beauté d’une conversation entre la directrice de l’institut et une cliente. Je sentais que le courant ne passait pas du tout entre elles. La cliente expliquait son problème et se demandait si la directrice la comprenait.

L’expression du visage est extrêmement importante.

Vos objections potentielles

Quand on vous explique une problématique, vous avez envie de rétorquer, de dire ce n’est pas ceci, ce n’est pas cela. Pensez à vos propres objections, mais pensez aussi aux objections que la personne qui est en face de vous va avoir quand vous, vous allez lui présenter certains faits.

Car si vous, vous présentez certains faits qu’elle peut immédiatement rejeter, là on est dans un jeu de tennis.

Essayez de devancer, de planifier, de façon à ce que cette conversation continue à être constructive.

Vos questions potentielles

Vous aurez peut-être d’autres questions à poser à cette personne, même si vous avez tous les faits. Au cours d’une conversation, vous évoluez. Parfois, vous dites des choses que vous avez oublié de dire dès le début.

L’important aussi, c’est d’anticiper les questions potentielles que vous pouvez poser et les questions que votre interlocuteur va vous poser.

Préparez-vous

Je travaille beaucoup avec des leaders, des directeurs, qui sont dans des périodes de transition, dans le changement, ils ont beaucoup de conversations.

Lorsqu’ils utilisent cette structure, elle fonctionne.

Est-ce toujours dans cet ordre-là ? Non, c’est à vous de choisir mais prenez tous les ingrédients de cette préparation à la conversation difficile. Votre conversation se passera bien mieux, car là vous ne penserez pas qu’à vous, mais vous penserez aussi à l’autre.

Évidemment, si vous lisez Jean-Paul Sartre qui dit «L’enfer ce sont les autres», vous n’irez pas très loin.

Mais je crois que c’est important de toujours penser non seulement à vous mais aussi aux autres, parce qu’on a tous un point de vue différent sur une même problématique.

Qu’aurait-il fallu faire pour la cliente dont la jambe a été infectée suite à une épilation ?

Les réponses des esthéticiennes dans la salle de conférences

- Revoir le protocole pour voir s’il y a eu un oubli,

- savoir ce qu’il s’est passé à la maison,

- savoir d’où cela pourrait venir,

- savoir si elle avait peut-être un problème dont elle n’a pas parlé,

- s’excuser…

Vous voyez que dans les conversations difficiles on pourrait partir sur des chemins très différents, surtout pour trouver des solutions.

Dans l’exemple de la cliente qui a eu une infection après une épilation, il y avait un énorme décalage entre ce que la cliente pensait et ce que la directrice pensait.  Il y avait une énorme distance, car leurs façons de penser n’étaient pas les mêmes.

Les questions que vous pouvez poser 

Quelles sont les questions possibles que vous pouvez poser ? C’est :

- «Que pensez-vous de ?»,

- «Vous aimeriez quoi comme solution ?»

- «Que pouvons-nous faire pour un dénouement positif ?».

Vous n’êtes pas obligée de rester dans le contexte de l’institut, vous pourriez offrir autre chose à la cliente mécontente.

Quand vous aurez eu votre conversation et que vous aurez suivi la structure dont je vous ai parlé, vous aurez une conversation beaucoup plus facile avec vos interlocuteurs. C’est clair.

Célébrer votre réussite 

Une des étapes qui est souvent oubliée, c’est de célébrer ces conversations. Petit à petit, elles vont élargir vos connaissances, vos expériences, vos compétences, mais souvent, vous oubliez de célébrer votre réussite.

Vous courez tous les jours, vous êtes très prise, vous oubliez de penser à vous-même et à votre développement personnel également. D’avoir réussi une conversation qui, au départ, n’était pas gagnée est très important pour votre motivation, votre confiance, votre bien-être, votre estime de soi.

Je crois que c’est une étape importante mais que vous oubliez très souvent car vous vivez trop rapidement. Je voulais insister sur ce point en vous disant : pensez à vous, félicitez-vous et n’oubliez pas les techniques que vous avez apprises, car vous aurez toujours des conversations difficiles.

Rappelez-vous une conversation difficile que vous avez réussie et dont le dénouement a été bon.

Une conversation peut paraître plus difficile si vous avez moins d’expérience que quand vous en avez davantage.

L’important est de réfléchir sur soi et d’apprendre aussi sur soi-même. Le plus difficile n’est pas seulement la personne qui vous fait face, mais c’est aussi d’apprendre sur soi-même ce dont vous êtes capable.

J’espère que vous allez pouvoir utiliser cette méthode. Je sais qu’elle est très utile, je fais beaucoup de simulations avec mes clients sur des scénarios de conversations difficiles.

Je filme même ces conversations. Ainsi, mes clients peuvent avoir toutes leurs attitudes. Les non-dits peuvent agacer vos interlocuteurs. Donc, si vous pouvez faire des simulations, et vous filmer, vous apprendrez beaucoup sur vous-même.