Tout ce que vous devez savoir sur le détatouage

Explications avec le Docteur Jordan Gendre, directeur médical de Ray Studios, premier centre dédié au détatouage en France

Principes du détatouage au laser

L’acte de détatouage au laser est un acte uniquement médical, comme l’explique le Docteur Jordan Gendre : «Nous utilisons des lasers pigmentaires, dits picolasers. Ce sont des lasers de dernière génération, uniquement dédiés au détatouage. Ceux-ci vont être différents des lasers utilisés en dépilation ou vasculaires. Par rapport au nanolaser, laser d’ancienne génération, le picolaser permet un effacement du tatouage plus rapide avec un nombre de séances moindre. Notre but, en fonction de la couleur du tatouage, est de retracer point par point l’ensemble du tatouage, tout en envoyant différents faisceaux d’ondes pour éclater les billes d’encre». L’acte de détatouage n’abîme pas la peau, comme l’explique le Dr. Jordan Gendre : «L’intérêt de cette technique est de ne pas altérer la peau. Les lasers que l’on utilise s’attaquent uniquement à l’encre. Plusieurs séances sont nécessaires afin de pouvoir éclater 100 % des billes d’encre. À la première séance, ce sont les billes en surface qui sont éclatées et, progressivement, avec les séances suivantes, nous allons éclater les billes qui sont plus en profondeur».

La prise en charge

Le Dr Jordan Gendre explique la prise en charge des patients au sein du centre Ray Studios : «La première séance est un échange avec le patient sur la vie de son tatouage. Nous allons également lui expliquer le principe du traitement, puis mesurer son tatouage afin d’évaluer le nombre de séances nécessaires et d’annoncer le prix au patient. Notre site Internet détaille bien les tarifs pour chaque type de tatouage. Le prix de base, pour une séance, pour un petit tatouage inférieur à 5 cm2, est de 99€».

Définition du nombre de séances

Le phototype

Le nombre de séances nécessaires pour faire entièrement disparaître un tatouage est défini selon plusieurs critères, comme l’explique le Dr Gendre : «Le premier facteur qui influe est le phototype. Plus le phototype est clair, moins nous aurons besoin de séances. Le faisceau laser agit sur la mélanine et, plus elle est présente en grande quantité dans la peau, plus le risque de brûlure est accru. De ce fait, les paramètres du laser doivent être plus faibles et le nombre de séances sera donc plus élevé».

La localisation

Le second facteur est la localisation du tatouage. Celui-ci disparaîtra plus ou moins rapidement en fonction de la zone. Le Dr Gendre explique comment le laser agit sur le pigment : «Le laser fragmente les billes d’encre en fines particules qui vont être digérées par les macrophages contenus dans la peau. Ces derniers vont ensuite rejoindre le réseau lymphatique au niveau des ganglions pour éliminer ces particules naturellement. En fonction de la localisation du tatouage, le réseau lymphatique est plus ou moins dense. Plus le réseau lymphatique est important, mieux les particules seront évacuées. Le tatouage s’efface donc plus vite lorsqu’il est situé au niveau de la tête, du cou et du tronc. Cela part un peu moins vite plus on s’approche des extrémités».

La couleur de l’encre

Troisième paramètre et non des moindres, la couleur est à prendre en compte dans le cadre d’un détatouage. Certaines couleurs ne peuvent pas s’effacer. «Le noir est la couleur qui s’efface le plus facilement. Plus il y a de couleurs, moins ce sera facile à effacer. Certaines couleurs sont impossibles à retirer, comme les couleurs très pâles et surtout le blanc. Les longueurs d’ondes sont utilisées en fonction de la couleur du tatouage. Le blanc n’est pas une couleur, c’est le prisme de toutes les couleurs. De ce fait, le laser ne fonctionne pas» décrit le docteur.

Les couches d’encre, l’état de la peau

«Si on a plusieurs couches d’encre, que plusieurs tatouages ont été réalisés au même endroit, autrement appelé un cover, le tatouage sera plus difficile à effacer. L’état de la peau est également important. Si un tatouage a été réalisé sur une cicatrice, le détatouage sera plus long, étant donné l’état fragilisé de la peau» conclut le Dr Jordan Gendre.

Les esthéticiennes et le détatouage

Mise en garde sur l’utilisation de l’acide lactique

Certaines esthéticiennes peuvent être amenées à utiliser de l’acide lactique pour des actes de détatouage, ce dont elles ont le droit. Néanmoins, le Dr Gendre le déconseille car cela entraîne des lésions cutanées importantes : «Nous avons un certain nombre de patients qui viennent nous voir suite à un détatouage à l’acide lactique, dont le résultat n’est pas satisfaisant. En effet, l’utilisation de l’acide lactique entraîne des séquelles irréversibles comme des cicatrices, des malformations au niveau de la peau et des «tatouages mosaïques», tatouages partiellement effacés. Se retrouver avec des cicatrices sur des parties visibles du corps comme les avant-bras peut être difficile psychologiquement pour les patients».

Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le rapport de décembre 2021 du HCSP, recommandant de ne pas utiliser cette technique : https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=970

La pratique du laser

L’acide lactique n’étant pas la meilleure alternative pour effacer un tatouage, sachez que vous pouvez détatouer au laser, sous certaines conditions. «Les esthéticiennes peuvent pratiquer le détatouage, sous couvert d’un médecin, tout comme pour l’épilation au laser. Les assistantes esthétiques sont bien souvent des esthéticiennes qui ont suivi des formations d’assistante médicale. Il faut retenir qu’un médecin doit être présent sur place» explique le Dr Gendre.

Qui se fait détatouer et pourquoi ?

Le détatouage est essentiellement une affaire de femme, comme l’explique le Dr Jordan Gendre. «Notre patientèle est majoritairement féminine. 20 % de nos prestations sont effectuées dans le cadre du maquillage permanent.»

Des raisons diverses

Étonnamment, la moyenne d’âge des personnes qui se font détatouer pour un tatouage à motif, chez Ray Studios, est jeune, 32 ans. Plusieurs raisons poussent les patients à sauter le pas. «On retrouve le retrait d’un tatouage qui n’a plus de sens pour le patient : une date ou un prénom. Vient également le retrait d’un tatouage démodé. En effet, de plus en plus de personnes se font tatouer sur un coup de tête et finissent par le regretter. Aussi, certains tatouages qui étaient à la mode il y a quelques années et qui ne le sont plus peuvent amener le patient à vouloir le retirer. Certains tatouages changent avec le temps. Ils peuvent s’effacer, les traits baver ou bien la couleur peut s’estomper. Le tatouage n’est plus très esthétique, le patient souhaite donc le retirer. Enfin, certains patients sont amenés à regretter leur tatouage très rapidement, ils ne le supportent pas et souhaitent le retirer» explique le Dr Jordan Gendre.

Le cas du cover

Moins connu sous cette forme, le détatouage peut aussi être réalisé dans le cadre d’un cover, le recouvrement d’un ancien tatouage par un autre tatouage. Pour rendre ce cover plus facile, le patient peut recourir à un détatouage pour que le nouveau tatouage soit plus facilement tatoué. «Dans ce cas, on estompe l’ancien tatouage avec quelques séances de laser. Cela est très pratiqué dans l’émission Tattoo Cover, diffusée sur TFX. C’est un véritable travail de collaboration avec les tatoueurs, mais aussi les centres esthétiques. En effet, cela est valable aussi pour les patients qui veulent par la suite refaire un microblading par-dessus un ancien, par exemple» explique le docteur.

Que peut-on détatouer ?

Les raisons qui entraînent les patients à pousser la porte des centres de détatouage sont diverses selon le Docteur Gendre. «Le détatouage s’adresse aussi bien aux personnes qui portent un tatouage à motif, qu’aux personnes qui portent du maquillage permanent.» Évidemment, la demande de détatouage est davantage formulée pour les tatouages à motifs. «Cela représente 80 % de nos prestations. C’est la partie la plus importante de notre activité. Chez Ray Studios, au niveau des prestations, 20 % sont représentées par le retrait de maquillage permanent, de dermopigmentation. Le sourcil est la partie la plus traitée en maquillage permanent, à hauteur de 15 %. On peut agir également sur les fausses taches de rousseur et la dermopigmentation du cuir chevelu» détaille Jordan Gendre.

Que peut-on espérer en termes de résultats ?

Longtemps, nous avons pensé que le détatouage ne pouvait offrir que des résultats imparfaits. Aujourd’hui, le détatouage au laser se veut efficace, à condition de remplir les conditions nécessaires. «Il est possible d’avoir un résultat parfait. Le but est de faire peau neuve. En revanche, nous prévenons toujours nos patients que cela demande du temps et un certain investissement. »

Quelles conséquences sur la peau ?

«Le détatouage permet de revenir à une peau tout à fait normale. La séance de laser, tout comme pour le tatouage, peut provoquer de petites réactions cutanées comme des petites croûtes et des petits saignements. C’est pour cette raison, qu’après chaque séance, nous demandons au patient d’appliquer une crème hydratante et cicatrisante. Aussi, nous lui demandons, pendant la durée des séances de détatouage, de limiter l’exposition au soleil ou privilégier l’utilisation régulière de crème solaire SPF50. Sinon, par manque de soin, le patient peut s’exposer à un trouble pigmentaire sur la zone comme de l’hypo ou de l’hyperpigmentation. Ces éventuelles complications restent toutefois transitoires. La peau sera comme avant» explique le Docteur Gendre.

Et côté douleur ?

La douleur est prise en compte lors des séances de détatouage. «Ce n’est pas plus douloureux qu’un tatouage. Il y a une sensation de picotement et de chaleur. On utilise une pommade anesthésiante, appliquée une à deux heures avant la séance. Pendant toute la durée de cette dernière, nous utilisons la cryothérapie. Pour ce faire, nous propulsons de l’air froid via un petit tuyau sur la zone, en continu, afin d’anesthésier les tissus. Nous utilisons également une technique d’ondes de choc acoustiques après la séance, c’est indolore, nous passons sur la zone un appareil qui permet de diminuer la réponse inflammatoire du laser» rassure le docteur.

Explications avec Anna Ferrario, esthéticienne spécialiste en pigmentation esthétique et correctrice, CEO d’Anna Dermo

Le recouvrement traditionnel

Si votre cliente a effectué un eye-liner ou bien un microblading raté, vous pouvez opter pour le recouvrement traditionnel, comme l’explique Florence Ferrario, esthéticienne : «L’acte de recouvrement traditionnel se fait à l’aide de pigments couleur peau. Cela sous-entend que l’esthéticienne repigmente par la suite la zone. Cela peut se faire afin d’obtenir des sourcils, une bouche ou un eye-liner plus harmonieux. Cette solution nécessite que l’on repasse sur la zone. Cela fonctionne bien. Les tarifs dépendent des techniciennes et des régions. Je suis personnellement à 80-90 euros plus cher que ma technique de base».

Le détatouage aux acides

Les acides lactique, glycolique et alcalin sont employés dans le cadre de cette technique, couramment utilisée par les esthéticiennes, comme l’explique Florence Ferrario : «Grâce au dermographe, nous allons injecter dans le derme un produit qui s’apparente à du lait ou de l’eau. Pour ce faire, nous allons effectuer des points ou des ronds dans la zone que l’on souhaite faire disparaître. L’acide va capter le pigment comme un aimant afin de le ramener vers la sortie, contrairement au laser qui laisse du pigment dans l’organisme. Il y a une action de rejet du pigment grâce aux acides.

À priori, nous pouvons utiliser les acides sur toutes les zones dont les yeux. Cette technique paraît peu adaptée pour détatouer les tatouages artistiques corporels. En effet, la peau du corps est plus épaisse que celle du visage. En termes de tarifs, nous sommes en général aux alentours des 100 euros pour une séance. Le nombre de séance dépend de la taille de la zone à détatouer». Toutefois, la spécialiste met en garde sur l’invasivité de la technique : «C’est une technique assez agressive. J’ai moi-même été détatouée et formée à cette technique. Cela reste socialement une contrainte. Les croûtes sont assez importantes».

L’encadrement du détatouage aux acides

C’est un acte qui n’est pour l’instant pas légiféré, comme le regrette Florence Ferrario : «Aucune législation n’existe à ce jour, bien que pléthore de formations soient proposées. Beaucoup de personnes ont envie de se faire détatouer sans passer par le laser qui est assez onéreux, ce qui pousse bien du monde à proposer cette technique. L’ARS Rhône-Alpes aurait déjà statuer plus ou moins, classant la prestation du détatouage aux acides comme un acte médical. Cela est donc interdit en région Rhône-Alpes. Théoriquement, les esthéticiennes qui pratiquent le détatouage aux acides, tout comme le maquillage permanent, doivent avoir suivi la formation Hygiène et Salubrité. Il y a en effet effraction cutanée puisque l’on retire le pigment. Cela se réfère à la réglementation de 2008 qui légifère le tatouage, le piercing et le maquillage permanent. Beaucoup l’ignorent et se font former au détatouage sans la formation Hygiène et Salubrité. Il faudrait que cela soit légiféré par un diplôme ou un programme d’État. Certaines personnes peuvent pratiquer un acte de détatouage aux acides sans pour autant faire du maquillage permanent comme les infirmières».

L'Effaceur de Styliderm utilisé et recommandé par Biotic Phocea

Un produit tout à fait novateur «L’Effaceur», lancé début 2018 en partenariat avec Styliderm, est utilisé durant ce protocole de détatouage. Il s’agit d’un gel-crème, sans acide, qui efface, estompe et gomme les traces de maquillage permanent sur le visage. Il peut être appliqué sur toutes les zones du visage : sourcils, lèvres et en périphérie des yeux, sur les eye-liners diffus par exemple. Les retours sont tous très positifs pour les petites zones. Il permet ainsi d’effacer le premier tatouage et de retatouer par-dessus.

Fonctionnement

Ce gel crème est destiné, par effraction cutanée, à s’introduire dans les couches superficielles de la peau afin d’en aimanter les colorants à l’aide d’un dermographe électrique. Le gel crème aimante les particules de pigment afin de les attirer vers l’extérieur. Les premiers résultats sont visibles immédiatement. Une croûte se forme. Il faut la laisser sécher et tomber naturellement, compter 7 à 10 jours.

Résultats

Il faut une à plusieurs séances suivant la nature du pigment et la profondeur d’implantation. En effet, un pigment minéral disparaîtra plus rapidement et de manière plus homogène qu’un pigment organique. Le principe de «L’Effaceur» est d’aimanter les oxydes de fer pour faire remonter le pigment en surface. Or, les pigments organiques n’en contiennent pas ou peu, ce qui diminue leur capacité à s’aimanter au produit. Depuis que la nouvelle réglementation REACH a interdit une quarantaine de pigments organiques dans les encres de tatouage, les encres organiques sont de moins en moins utilisées. Il est primordial d’être formé à cette technique avec ce produit, durant la formation Ultimate Correction au centre de formation Biotic Phocea.