Les nouveaux traitements de la dermatite atopique

Comment traiter aujourd'hui les poussées d'eczéma ?

Le traitement de fond

Le traitement de fond de la dermatite atopique est indispensable sur toute la surface de la peau.

Il passe par :

• L’hydratation, le nettoyage et les soins de la peau doux sans savon détergent.

• Le traitement local, dit topique, quotidien, avec des émollients/hydratants, pour graisser la peau encore humide après la douche. C’est l’aspect le plus important du traitement de la dermatite atopique puisqu’il va restaurer la barrière cutanée et empêcher la pénétration des allergènes déclencheurs des poussées d’eczéma.

• Les dermocorticoïdes sur les lésions rouges qui grattent (prurigineuse). Pour le traitement de la dermatite atopique chez le nourrisson avant l’âge de deux ans, seuls les dermocorticoïdes sont autorisés pour soigner la peau de bébé. Ensuite, d’autres produits peuvent être utilisés après avis médical (Tacrolimus).

• En prévention, attention aux cosmétiques, les irritants, la chaleur et le tabagisme passif.

Le traitement de l’inflammation sévère

Les traitements systématiques sont notamment prescrits en cas d’échec des traitements locaux à base de dermocorticoïdes, mais ceux-ci peuvent être maintenus en complément du traitement systémique. Quant aux émollients, ils restent indispensables pour corriger la xérose (sécheresse cutanée).

• La ciclosporine (Néoral) est un immunosuppresseur puissant indiqué chez le patient greffé pour limiter le rejet du greffon. Elle s’utilise aussi dans la dermatite atopique chez l’adulte (avec une autorisation de mise sur le marché dédiée) et parfois chez le grand enfant.

Les doses prescrites sont en général très inférieures à celles nécessaires aux patients greffés, et le traitement sera limité dans le temps (quelques mois, voire un à deux ans), le plus souvent pour passer un «cap» inflammatoire.

Remarque : d’autres immunosuppresseurs sont parfois utilisés dans l’eczéma. Il s’agit principalement du méthotrexate (imeth, metoject…), voire du mycophénolate mofétil (cellcept) et de l’azathioprine (lmurel).

• L’alitrétinoine (Toctino) est un rétinoïde indiqué dans l’eczéma chronique des mains de l’adulte en raison de ses propriétés anti-inflammatoires et immunomodulatrices.

• D’autres traitements peuvent être prescrits de façon ponctuelle : des anti-infectieux (antibiotiques en cas de surinfection bactérienne, antiviraux en cas de co-infection avec le virus de l’herpès…) ou des anti-histaminiques (notamment en cas de symptômes allergiques associés à l’eczéma : rhinite, conjonctivite…). Les corticoïdes par voie générale (voie orale ou voie injectable) sont encore parfois utilisés : à éviter au maximum, car cela peut conduire à un rebond de la crise d’eczéma !

• La photothérapie, un traitement à la frontière entre la voie locale et la voie systémique, est régulièrement utilisée en cas d’eczéma. C’est au départ une technique utilisée de façon empirique, en se basant sur l’amélioration cutanée, parfois spectaculaire, des patients atteints de dermatite atopique à la suite d’expositions solaires et pendant la saison estivale. Les séances ont lieu plusieurs fois par semaine pendant plusieurs mois.

Qu'est-ce que les biothérapies ?

Le dupilumab (Dupixent, Laboratoire Sanofi) est la molécule la plus souvent évoquée. Il s’agit d’un anti-corps monoclonal entièrement humain dirigé contre un récepteur spécifique et permettant d’inhiber les voies de signalisation de l’interleukine 4 (IL-4) et de l’interleukine 13 (IL-13). Ces deux interleukines sont des cytokines majeures impliquées dans la physiopathologie de la dermatite atopique. Le dupilumab s’administre par voie injectable sous-cutanée, chaque seringue préremplie en contient 300 mg. D’autres biothérapies sont en phase de test dans le traitement de la dermatite atopique pour bloquer d’autres cytokines impliquées dans la physiopathologie de la dermatite atopique : le lebrikizumab et le tralokinumab (bloquant sélectivement l’interleukine 13), le fezakizumab (bloquant l’interleukine 22), et le némolizumab (bloquant l’interleukine 31).

Les nouveaux traitements de l'eczéma

À côté des biothérapies injectables, d’autres molécules (appelées petites molécules car ce sont des médicaments produits par la chimie à la différence des biomédicaments sus-cités) sont en cours de développement avancé dans des essais cliniques :

- par voie orale (inhibiteurs de JAK bloquant la réponse inflammatoire dans la cellule comme le baricitinib, l’upadacitinib ou l’abrocitinib),

- anti-H4R (inhibant un récepteur de l’histamine différent des anti-histaminiques dits anti-H1 prescrits dans l’urticaire et la rhinite allergique) ou par voie locale (tofacitinib topique).

Dans cette dernière catégorie, une pommade au crisaborole (Eucrisa, Laboratoire Pfizer) est déjà disponible aux États-Unis mais pas en France. Le crisaborole est un inhibiteur de la phosphodiestérase 4 (impliquée dans l’activation des cellules de l’immunité), indiqué dans la dermatite atopique légère à modérée à partir de deux ans. Du fait du coût et du manque de recul, ces traitements innovants ne pourront s’envisager qu’en cas d’échec des traitements de référence. Ceux-ci comprennent dans un premier temps le recours ponctuel aux dermocorticoïdes en cas de crise et l’hydratation régulière de la peau entre chaque poussée. Mais pour de nombreux patients, surtout chez l’adulte, ce traitement de base ne suffit pas. D’où le recours à des alternatives locales (anticalcineurines : uniquement la pommade Protopic en France), et systémiques (photothérapie, immunosuppresseurs conventionnels comme la ciclosporine, dupilumab ou inclusion dans un essai clinique si disponible).

À qui s'adressent ces nouveaux traitements ?

Les nouveaux traitements seront bientôt proposés aux patients souffrant d’eczéma modéré à sévère, afin qu’ils puissent retrouver une qualité de vie satisfaisante. Ils concernent pour l’instant quasi exclusivement l’adulte, mais vont être dans un second temps disponibles pour les formes les plus sévères résistant aux traitements classiques chez l’adolescent puis l’enfant.

Ces nouveaux traitements ont-ils des effets secondaires ?

Il n’existe aucun traitement avec un risque nul d’effet indésirable. Mais il a été clairement montré dans les essais cliniques nécessaires au développement de ces nouveaux médicaments et dans les nombreuses études en «vraie vie» pour les traitements déjà disponibles, comme le dupilumab, que ces traitements étaient très bien tolérés, avec un rapport bénéfice (efficacité sur l’eczéma et les démangeaisons, amélioration de la qualité de vie) risque (potentiels effets indésirables) largement favorable, et même bien meilleur que les traitements systémiques classiques notamment la ciclosporine.

Le dupilumab peut être assez fréquemment responsable d’effets indésirables oculaires (notamment apparition d’une conjonctivite sous traitement ou majoration d’une conjonctivite préexistante, en général sans gravité, ne contre-indiquant pas la poursuite du traitement mais nécessitant la mise en place d’un traitement en collaboration avec l’ophtalmologue), et aussi parfois d’une poussée ou d’une persistance de l’eczéma du visage (souvent également contrôlée par les traitements locaux associés comme les inhibiteurs de calcineurine topique) ou d’une augmentation du taux d’éosinophiles dans le sang (une sorte de globules blancs qui peut être augmentée chez les patients atopiques en dehors du traitement) mais sans conséquences sur la santé du patient.

Pourra-t-on un jours soigner définitivement l'eczéma ?

On l’espère. L’objectif principal n’est pas forcément de faire disparaître toutes les lésions d’eczéma à vie (nous n’en sommes d’ailleurs toujours pas capables à l’heure actuelle malgré les progrès récents remarquables) mais d’offrir au patient la meilleure qualité de vie possible, avec le moins de poussées possibles, sur le long terme, avec des traitements (topiques et/ou systémiques) les mieux tolérés et les moins contraignants possible. Cela passe forcément par une approche globale de la maladie. N’importe quel traitement, même le plus moderne, ne sera jamais assez efficace s’il n’est pas associé à une éducation thérapeutique permettant de mieux vivre avec sa dermatite atopique et s’il ne s’inscrit pas dans une prise en charge personnalisée. En effet, il existe de nombreuses formes d’eczéma et chaque patient est unique en ce qui concerne son type d’atteinte cutanée, mais aussi sa santé en général, l’impact de l’eczéma sur sa vie, ses attentes vis-à-vis du traitement… L’arrivée de ces nombreux nouveaux traitements vient enfin renforcer notre arsenal thérapeutique pour offrir le meilleur traitement à chaque patient.