Les ados, leur peau, leur égo
Acné et impact psychologique
Un adolescent sur deux consulte un dermatologue pour son acné
Et pour cause, cette maladie de peau chronique du follicule pilo-sébacé est de loin l’une de leurs préoccupations majeures. 85 % sont touchés, et 15 % d’entre-eux souffrent d’acné sévère.
Traitements lourds et longs, récidives, frustration
Difficile pour ces jeunes, dans une société aujourd’hui, plus que jamais, régie par l’urgence et l’apparence, de comprendre que l’acné ne peut être soignée aussi rapidement qu’ils le souhaiteraient.
D’autant plus que cette maladie chronique peut entraîner des cicatrices invisibles : sentiment de honte, pression sociale, peur du jugement des autres, mauvaise estime de soi, vulnérabilité, mal-être ou encore anxiété, pouvant même plus rarement déboucher sur une dépression ou des troubles psychologiques.
Autant de blessures, plus ou moins profondes, plus ou moins visibles, qui peuvent affecter la personnalité, dans un monde où le renvoi de sa propre image (selfies, photos filtrées, physique décrypté, zoomé, analysé, commenté...) semble être primordial, voire indispensable.
Alors... comment les aider ? Pour les aider, il faut les traiter, et pour pouvoir les traiter, il faut savoir s’adapter.
L’acné peut entraîner dépression et troubles psychologiques
De nouveaux codes
Comment aborder les adolescents du 21ème siècle ?
Le Dr Olivier Revol, Chef de Service de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent au CHU de Lyon, apporte ses éléments de réponse aux dermatologues et parents, souvent désarmés face aux adolescents 3.0 : il faut comprendre leurs codes et leur langage pour mieux les approcher, les comprendre et les soigner.
Une génération complexe
Yolo (You only live once) : voici le maître-mot de la génération dite «Z». Cette nouvelle génération –connectée aux réseaux sociaux de façon systématique et presque innée- préfère comprendre plutôt qu’apprendre et pense même en savoir plus que ses parents... Et pour cause, elle est contemporaine de l’arrivée d’Internet et de l’information omniprésente –et vit dans le stress de l’insécurité.
Malgré tout prometteuse et en pleine mutation, cette jeunesse s’inscrit comme un effet miroir de notre société.
Elle est réfléchie
Beaucoup moins dans l’affrontement ou l’opposition, elle est cependant dans un questionnement de la légitimité des adultes et a choisi de s’en démarquer.
Elle est ouverte
Confrontée aux commentaires sur Facebook ou Instagram, elle a appris à vivre dans l’autodérision et à accepter les critiques, souvent virulentes. En outre, elle affiche un rapport plus décomplexé à l’erreur et a ainsi tendance à moins se braquer.
Elle est sensible
Tolérante, sensible, ouverte sur le monde et ses possibilités, éprise de liberté mais aussi de réassurance, cette nouvelle génération est cependant confrontée à des problèmes bien réels : relations familiales délicates, troubles de l’humeur, tristesse, stress, manque de sommeil, apparence sans cesse scrutée (likée, analysée, commentée, largement diffusée) et rythme de vie toujours plus pressé, avec un rapport au temps mal évalué et apprécié.
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La conséquence directe de cet ADN marqué est que cette génération, si elle souffre des mêmes problèmes cutanés que celles qui l’ont précédée, ne doit pas être approchée de la même façon pour les gérer.
Quelques conseils du Dr Revol
Les conseils que le Dr Revol donne à ses collègues médecins peuvent aussi s’appliquer aux esthéticiennes.
Gagnez votre légitimité
La légitimité de l’adulte, donc de l’esthéticienne, n’est plus aujourd’hui innée. Car les adolescents d’aujourd’hui, avertis sur tous les sujets par le biais d’Internet et de la communication ultra accessible, ont les moyens de remettre en question vos affirmations, vos connaissances, votre enseignement.
Observez
Pour améliorer les soins, il est fondamental de voir l’adolescent seul, afin de le responsabiliser dans le choix de son traitement et d’évaluer en parallèle son humeur et son niveau d’anxiété, l’acné pouvant avoir de sévères répercussions sur le moral et un impact majeur sur les émotions.
Créez un climat de confiance
Vous devez créer une relation de confiance avec l’adolescent, lui parler «cash», l’aider à trier l’information (massivement reçue via le web), lui expliquer tout ce qu’il a à gagner dans son traitement et l’aborder par la périphérie (la confrontation face à face, trop infantilisante, étant souvent vouée à l’échec), tout en affirmant via votre expérience, votre légitimité.
Adaptez-vous
Expliquez sans tricher, apprenez à connaître leurs valeurs qui comptent pour lui, utilisez ses outils de communication, manifestez de l’empathie, ne le culpabilisez pas, négociez (plutôt que d’imposer), appuyez-vous sur ses projets de vie : autant de postures et d’attitudes qui mettent l’adolescent en confiance, le responsabilisent. Et l’incitent, ainsi, à traiter son acné de façon optimale.
Acné : tout ce qu'il faut retenir
1872
C’est la date de la première publication sur le sujet. Elle y précisait que l’âge de l’apparition de l’acné chez les filles comme les garçons était de 12 ans. En 2010, le chiffre, revu, indiquait un âge toujours semblable pour les garçons, mais légèrement inférieur chez les filles (11 ans). Avec un pic atteint vers 15-16 ans pour les deux.
Symptômes
Une peau grasse, notamment localement (nez, front, joues) ainsi que des lésions rétentionnelles (comédon ouvert -point noir-, comédon fermé, microkyste), et/ou inflammatoires (superficielles -avec papules et pustules, mais aussi profondes avec nodules).
Dermatose chronique
L’acné, cette dermatose chronique très courante, se développe en trois phases : hypersécrétion de sébum, formation de lésions rétentionnelles liées à l’obstruction du canal folliculaire et formation de lésions inflammatoires, où la bactérie Propionibacterium acnes joue un rôle important.
Pour créer une relation de confiance avec l’adolescent, il faut lui parler «cash»
40 % de la population
L’acné n’est pas seulement adolescente, elle peut être aussi adulte. Et touche, là, près de 40 % de la population, principalement les femmes et sur la moitié inférieure du visage (pour les hommes, elle se localise sur le dos). Si elle concerne certains patients qui commencent uniquement à avoir de l’acné à cette période (20 %), elle touche majoritairement ceux qui ne se sont jamais débarrassés de leur acné adolescente (80 %).
Facteurs de risque
Des prédispositions génétiques mais aussi des changements hormonaux, une exposition au soleil et le stress. Tabac et alimentation auraient, eux, encore tendance à faire débat...
Complication n° 1
Les cicatrices... On en distingue 3 types : atrophiques (sortes de petits cratères qui ne régressent pas spontanément), hypertrophiques (zones de peau en relief, de la taille de la lésion d’origine) et chéloïdes (plus grandes, causées par une excroissance fibreuse dans la peau, et qui laissent des marques).
Acné sévère
Il existe 3 formes d’acné sévère : celle nodulaire (principalement chez les hommes, avec des nodules pouvant se transformer en abcès), celle conglobata (une variante plus sévère et souvent héréditaire, avec un aspect grêlé et des cicatrices) et enfin celle fulminante (la plus grave et choquante, avec des poussées de lésions acnéiques très inflammatoires, pouvant devenir purulentes, accompagnées de fièvre et de douleurs).
Hygiène
Contrairement aux idées reçues, peau sale et acné ne sont pas liées. Cependant, il est fondamental de nettoyer sa peau 1 à 2 fois par jour avec des gels dermatologiques sans savon, et appliquer quotidiennement, pour optimiser la tolérance des traitements, une crème hydratante adaptée aux peaux à tendance acnéique. En parallèle, et en cas de besoin, maquillage médical à texture non grasse et non comédogène et produits de photo-protection adaptés sont plus que recommandés.