La peau face au soleil
Le soleil et les «taches» sur la peau
• Est-ce que les taches de vieillesse se multiplient et/ou grandissent lors d’expositions au soleil ?
Il faut d’abord préciser que, lorsqu’on parle de «taches de vieillesse», il s’agit essentiellement des lentigos, qui sont des petites macules (mot dermatologique pour désigner des taches sur la peau, sans relief ni infiltration). De couleur beige, avec une tendance à brunir avec les années, on les observe au niveau du dos des mains, sur les avant-bras et le décolleté, surtout chez les personnes âgées. Ce qui leur vaut cette appellation un peu injuste car les lentigos peuvent apparaître, dès l’enfance ou l’adolescence, en particulier au niveau du dos après un coup de soleil important.
Oui, les lentigos se multiplient et grandissent sous l’effet des UV.
C’est pourquoi ils sont surtout observés chez les personnes âgées accros au soleil, la période d’exposition s’allongeant au fil du temps.
Si vous devez préciser la cause des lentigos, vous pourrez expliquer qu’ils sont la conséquence d’une augmentation du nombre de mélanocytes normaux au fond de l’épiderme.
• Pourquoi le soleil fait-il apparaître des taches de rousseur ?
Les taches de rousseur, ou éphélides, sont des petites macules de quelques millimètres de diamètre, de couleur brun clair, localisées au niveau du visage, des avant-bras et des jambes.
D’origine génétique, elles sont caractéristiques des sujets de phototype clair, les roux surtout, et apparaissent en général dès l’enfance.
Oui, la pigmentation des éphélides s’accentue au soleil.
Ils traduisent une surproduction de mélanines par les mélanocytes sous l’effet des UV. Cette hyperactivité localisée des mélanocytes n’a pas trouvé d’explication définitive.
• Pourquoi certaines de vos clientes se retrouvent-elles marquées par des grandes taches brunes au niveau du visage après des expositions au soleil ?
Dans ce cas, il s’agit d’une dermatose nommée mélasma qui se manifeste par un brunissement exagéré de certaines régions du visage et qui survient dans la seconde moitié de la grossesse, surtout si l’on a une peau mate.
Oui, le soleil est en cause.
Vous pourrez préciser que deux éléments interviennent pour créer cette anomalie :
- le «climat» hormonal modifié par l’état de grossesse (d’où l’ancienne appellation de «masque de grossesse») + le soleil,
- ou la prise de pilules contraceptives (qui modifie évidemment aussi le climat hormonal !) + toujours le soleil.
Et vous ne manquerez pas de dire à votre cliente qu’il faudra du temps pour que ses taches disparaissent, à la condition de prendre soin de bien protéger son visage pendant les périodes de fort ensoleillement.
Enfin, vous le savez, les expositions aux ultraviolets artificiels ont les mêmes effets délétères.
Avec une conséquence : vous devez refuser toute prestation UV aux femmes enceintes et… vous devez informer du risque de mélasma vos clientes qui sont sous pilules contraceptives.
• À quoi correspondent les petites taches blanches, multiples, «à l’emporte- pièce», situées au niveau des jambes de certaines de vos clientes qui ont passé la cinquantaine ?
Il s’agit d’une hypomélanose en gouttes que l’on observe effectivement au niveau de la face antérieure des jambes surtout chez les femmes s’exposant beaucoup au soleil.
Oui, ce problème est un stigmate du vieillissement de la peau lié à une raréfaction des mélanocytes et surtout à une altération de la mélanogenèse sous l’effet des UV.
Le coup de soleil est une fausse brûlure
À propos des coups de soleil…
• Le coup de soleil : une brûlure ?
Non. Le coup de soleil est une fausse brûlure.
La rougeur (érythème) qui apparaît entre 3 et 5 heures après le début de l’exposition malencontreuse est la conséquence d’une dilatation des vaisseaux du derme.
Qu’il se traduise par un simple érythème ou par des phlyctènes, le coup de soleil est une réaction inflammatoire violente due aux UVB essentiellement, qui provoque de graves dégâts au niveau des kératinocytes épidermiques (sunburn cells – cellules «coup de soleil»).
Ces kératinocytes sont détruits, cette destruction étant peut-être un mécanisme de protection permettant leur élimination car elles sont à fort potentiel de transformation cancéreuse.
• Est-ce qu’une peau noire peut avoir des coups de soleil aussi graves qu’une peau blanche ?
Non, le coup de soleil, surtout «grave», nécessite des conditions extrêmes pour les peaux noires.
Le rougissement observé parfois chez vos clientes à peau sombre qui s’exposent imprudemment au soleil est dû aux infrarouges, dont la chaleur qu’ils émettent produit une dilatation des vaisseaux du derme.
Crème de protection solaire rime souvent avec des expositions excessives au soleil
Les cibles privilégiées du soleil
• Les hommes ont la peau plus épaisse, sont-ils pour autant mieux protégés face au soleil ?
Non, les hommes ne sont pas mieux protégés du soleil que les femmes.
En effet, s’ils ont bien la peau plus épaisse que les femmes, c’est parce que leur collagène dermique est plus abondant. Or, la protection naturelle contre le soleil se trouve dans l’épiderme, grâce aux mélanines synthétisées par les mélanocytes sertis au fond de cette couche vitale de la peau.
• Blondes, brunes, rousses, pourquoi vos clientes ne sont-elles pas toutes égales face au soleil ?
Oui, vos clientes ne sont pas toutes égales sous le soleil.
Ici, c’est la génétique qui parle ! Leur logiciel de vie est paramétré contre l’agression UV du soleil par leur photototype, qui détermine la qualité des mélanines produites par leurs mélanocytes et indique le niveau de protection de la peau de chacune d’entre elles contre le soleil et leur capacité de bronzage.
Sachant que les mélanocytes produisent les deux variétés de mélanines, c’est donc le pourcentage de phaéomélanines (responsables des couleurs claires) et d’eumélanines (pigments bruns qui donnent les couleurs sombres) synthétisées qui vont mesurer le niveau de protection.
Ainsi, vos clientes qui produisent essentiellement des phaéomélanines, les rousses surtout, seront incapables d’élaborer un bronzage protecteur contre les irradiations UV. Les blondes, et a fortiori les brunes dont les mélanocytes sont formatés pour synthétiser surtout des eumélanines, seront mieux protégées.
Avec, évidemment les mille nuances entre les deux extrêmes.
• Certaines de vos clientes disent : «Moi je n’ai jamais de coup de soleil». Comment est-ce possible ?
Pourquoi pas ?
C’est encore la génétique qui donne la réponse : leur bouclier de protection contre les UV est évidemment très riche en eumélanines.
Il est donc possible qu’elles n’aient jamais de coups de soleil. Surtout si elles respectent les règles d’exposition…
L'oeil face au soleil
• Pourquoi certaines de vos clientes n’ont pas besoin de lunettes de soleil et d’autres sont complètement aveuglées ?
C’est vrai.
Et là encore, c’est une histoire de mélanines !
Vos clientes ont toutes des mélanocytes à l’intérieur des yeux, au niveau de la choroïde, la couche moyenne des enveloppes qui forment l’oeil et de l’iris, où ils leur donnent leur couleur.
Comme dans l’épiderme, le pourcentage des pigments produits, eu- ou phaéomélanines, déterminera le degré d’irradiation par les UV que subira la rétine.
À noter. Le port de lunettes de soleil est toujours conseillé pour protéger le cristallin des UVA. Il s’agit d’une lentille biconvexe située juste derrière l’iris, dont les variations de courbures permettent à l’oeil de former sur la rétine une image nette, lorsqu’on passe instantanément de la vision de près à la vision de loin et vice versa. Ce sont les UVA qui induisent, sur le long terme, une opacification des cellules qui le constituent, nommée cataracte, responsable d’une perte progressive de la vision.
Vous comprenez donc le port indispensable de lunettes adaptées dans les solariums, grands pourvoyeurs d’UVA !
Le soleil et les cancers de la peau
• Il y a pléthore de protections solaires et, paradoxalement, il y a de plus en plus de cancers de la peau. Comment expliquezvous cela ?
C’est vrai.
La cause de ce paradoxe est la mauvaise utilisation des crèmes de protection solaire !
Cette réalité a été constatée dans les années 1990 par le Dr Marianne Berwick qui a jeté un énorme pavé dans la mare lorsqu’elle a annoncé les résultats d’études épidémiologiques qu’elle a menées entre 1974 et 1993. Pendant près de 20 ans, elle a réalisé des statistiques pour montrer que, sous une couche de crème solaire, on n’est pas protégé contre le redoutable mélanome. Au contraire, on multiplie le risque par deux ou par trois !
Comment expliquer ce constat stupéfiant ?
«Il faut avant tout parler de la conduite des utilisateurs», dénonçait alors le Dr Marianne Berwick, appuyée par J.F. Doré (Inserm – Lyon), qui affirmait déjà que les crèmes de protection solaire sont un «dispositif de sécurité qui est mal employé».
Si ce problème est peut-être moins aigu aujourd’hui grâce aux campagnes d’information, il faut bien admettre que crème de protection solaire rime souvent avec des expositions excessives au soleil, car on se croit protégé. Ce qui n’est pas le cas, car souvent, vos clientes ne respectent pas les règles d’utilisation des photoprotecteurs :
- répétition des applications au moins toutes les deux heures et après chaque baignade malgré les progrès des cosmétiques,
- application en couche mince de la crème, sans tenter de la faire pénétrer (les photoprotecteurs n’ont pas été conçus pour ça), mais régulière surtout sur les régions à risque maximal, car irradiées tout au long de l’année (visage, cou, mains), c’est là que se développent les carcinomes cutanés et c’est là que la peau vieillit plus vite (pour le reste du corps, tout dépend du phototype),
- respect de son phototype pour appliquer le bon indice,
- application de la bonne dose du produit : vos clientes sont pour la plupart loin du compte en appliquant la moitié ou le quart de la dose nécessaire pour une protection optimale, divisant du même coup l’efficacité du produit dans les mêmes proportions…
• Faut-il autant se méfier du soleil en ville qu’à la plage ?
Bien sûr, au moins pour les UVA, car ces radiations sont présentes autant en ville qu’à la plage.
Pourquoi faut-il se méfier des UVA ?
Parce que ce sont les UVA qui sont responsables du vieillissement cutané dit actinique.
Ces rayonnements pénètrent en effet profondément dans le derme, siège du vieillissement de la peau, les UVA produisant des effets spécifiques : creusement des rides et épaississement de la peau.
Or, les UVA bombardent vos clientes toute la journée, en ville comme à la plage sachant qu’il y a autant d’UVA le matin que le soir, et ceci de mai à septembre, sous nos latitudes.
Quant aux UVB, particulièrement agressifs en milieu de journée, il semble bien que c’est à la plage que vos clientes sont le plus irradiées, à la recherche d’une peau caramélisée. Avec les risques que l’on connaît.
• Pourquoi y-a-t-il plus de cancers de la peau en Australie ?
C’est vrai, l’Australie enregistre le plus fort taux de mélanomes au monde.
On peut invoquer deux causes pour expliquer ce phénomène : la population est d’origine anglo-saxonne à peau plutôt claire et elle vit dans des régions à forte irradiation. Deux facteurs de risque sans doute essentiels.