Grossophobie VS Body Positive
Cet équilibre est particulièrement difficile à trouver dans une société schizophrène qui jongle en permanence entre le mouvement body positive visant à l’acceptation de tous les corps et les injonctions publicitaires d’atteindre une taille mannequin. Il en résulte un très probable manque de sensibilisation sur le surpoids et l’obésité, à la fois sur ses causes et ses conséquences sur la santé.
Les Français sont-ils grossophobes ?
L’OMS a récemment qualifié l’obésité d’épidémie, c’est-à-dire une maladie se propageant de façon rapide. Pourtant, dans sa dernière enquête, Qilibri révèle que seulement 63 % des Français considèrent véritablement l’obésité comme une maladie. Paradoxalement, alors qu’une maladie est généralement subie, pour près de 8 sondés sur 10, une personne obèse ou en surpoids est partiellement ou totalement responsable de sa situation. Ces deux chiffres montrent bien le manque de sensibilisation sur une maladie aux racines multifactorielles (génétiques, hormonales, condition sociale…), maladie qui pourrait par ailleurs être atténuée par la diffusion de meilleures connaissances diététiques au sein de la société.
L’obésité française suit l’exemple américain !
La comparaison des courbes d’obésité françaises et américaines est particulière-ment frappante et doit nous pousser à nous demander si notre désinformation sur le sujet ne se retournera pas un jour contre nous. En effet, selon une étude menée dans 16 États par les autorités sanitaires américaines, le taux d’Américains obèses est passé de 19 % en 1997 à plus de 35 % en 2020. Si les États-Unis font largement la course en tête, la France suit la même tendance.
Sur cette période, la proportion de personnes obèses en France a elle aussi doublé pour atteindre 17 %, soit un taux proche de celui des États-Unis il y a 25 ans. Un Français sur deux est aujourd’hui soit en surpoids, soit en situation d’obésité. Cette situation est particulièrement alarmante quand on connaît les conséquences très néfastes du surpoids et de l’obésité sur la santé et sur l’espérance de vie.
Les personnes obèses peuvent perdre jusqu’à 7 ans d’espérance de vie et pourtant les Français continuent de percevoir cela comme moins dangereux pour la santé que la cigarette et l’alcool. Dans l’imaginaire collectif, ces deux fléaux sont plus dangereux pour la santé que l’obésité, alors que cette dernière est responsable de 180 000 décès par an en France selon La Ligue Contre l’Obésité, soit plus que les deux autres cumulés.
Se taire pour éviter un procès en grossophobie
C’est une contradiction qu’il faut corriger au plus vite ! «Malgré sa dangerosité avérée pour la santé, on perçoit à travers notre sondage que les Français sont clairement moins sensibilisés, voire désinformés sur les impacts du surpoids et de l’obésité sur la santé» analyse Antoine Chabassol, fondateur de Qilibri. «Les campagnes gouvernementales sur le sujet ne semblent pas efficaces, alors qu’il s’agit d’un réel enjeu de santé publique. Il ne s’agit pas de se soumettre aux diktats des publicitaires, mais d’accepter son corps tel qu’il est sans pour autant oublier les impacts réels du surpoids sur la santé et l’espérance de vie. Or dans les médias, ce sujet est quasiment absent : les articles body positive prônant l’acceptation de soi côtoient ceux sur le Summer Body et ses injonctions impossibles au corps parfait, particulièrement à destination des femmes. Entre ces deux pôles, les impacts du surpoids et de l’obésité sur la santé sont les grands absents» alerte-t-il encore.
Une urgence à proposer une méthode de perte de poids sans fausses promesses
Clément Baubant, diététicien-nutritionniste, se désole de voir des patients arriver en première consultation aveuglés par toutes sortes de méthodes miracles : «Pilules, crèmes amincissantes, régimes restrictifs à la mode ou encore monodiète-detox… Mes patients ont tout tenté pour perdre du poids. Dans le meilleur des cas, les moyens utilisés ont été inefficaces. Dans la majorité, et malheureusement dans le pire des cas, ces restrictions ont eu des conséquences très dangereuses pour leur santé».
«Il ne s’agit pas de faire perdre du poids pour correspondre à un certain idéal véhiculé sur Instagram, dans les films ou les défilés de mode. Il s’agit de guider les personnes vers leur poids de forme, de les aider à améliorer leurs indicateurs de santé comme le cholestérol, l’essoufflement ou les problèmes de sommeil fréquemment liés au surpoids ou à l’obésité. Il s’agit surtout de changer leurs habitudes alimentaires sur le long terme pour qu’ils comprennent que la clé réside dans l’équilibre alimen-taire et non pas dans les régimes à la mode, parfaitement inefficaces, qui fleurissent sur Internet dès que le soleil pointe et que les vacances d’été approchent» conclut Antoine Chabassol.