Le chemin cutané des principes actifs
Par définition, les produits cosmétiques sont destinés à agir sur les couches superficielles de la peau, sans traverser l’épiderme.
Cette précision les différencie des médicaments qui peuvent eux traverser la peau pour rejoindre la circulation sanguine.
Mais dans les deux cas, le chemin à parcourir est difficile et cette migration dépend de nombreux facteurs.
Un chemin semé d'embûches
De nombreuses propriétés de la peau la rendent relativement imperméable. Ce qui ne facilitera pas la pénétration des principes actifs.
En effet, il faut réellement imaginer la peau comme étant une barrière quasiment infranchissable.
- Tout d’abord, en surface, elle est recouverte d’un fluide protecteur, le film hydrolipidique ou film cutané de surface, formé d’un mélange de sueur et de sébum.
- Ensuite, nous parvenons à la couche cornée. Il s’agit là d’une couche très compacte formée de cellules aplaties, relativement rigides, imbriquées les unes dans les autres et fortement liées entre elles.
Et pour compliquer la tâche, les quelques espaces libres présents entre ces cellules sont remplis d’un ciment intercellulaire formé de lipides.
- En dessous, les autres couches de l’épiderme sont tout aussi compactes. Vous voyez donc que la pénétration des produits actifs ne semble pas être une sinécure.
Plusieurs chemins pour une même direction
Toutefois, pour passer à travers la peau, les molécules des principes actifs peuvent emprunter différentes voies. Le choix se fait essentiellement en fonction de la nature et de la taille des composés.
Par exemple, si les molécules sont de petites tailles et de nature lipophile, alors elles vont migrer dans l’épiderme en se mélangeant au ciment intercellulaire.
Si, à l’inverse, elles sont de nature hydrophile, elles passeront plus facilement en traversant les cellules épidermiques.
Ces deux voies sont dites intra-épidermiques et plus précisément intercellulaire dans le premier cas et transcellulaire dans le second.
- Pour les molécules plus volumineuses, elles peuvent utiliser les pores et les canaux sudoripares pour traverser l’épiderme; il s’agit alors de la voie glandulaire.
- Ou bien, elles peuvent emprunter le canal pilaire des follicules ; il s’agit alors de la voie folliculaire.
Tout dépend de la nature du produit à faire pénétrer
Comme nous venons de le voir, la capacité de pénétration des principes actifs est limitée par la taille et la nature des molécules à faire pénétrer.
Ainsi, il est reconnu que les principes actifs des huiles essentielles sont de très bons clients pour la pénétration cutanée ; car ce sont des petites mo- lécules de nature lipidique.
À l’inverse, les protéines, telles que le collagène, les glycoprotéines, l’acide hyaluronique, auront beaucoup plus de mal à traverser la barrière cornée.
De manière très chiffrée, il a été mesuré que les molécules pouvant pénétrer la peau doivent avoir une masse moléculaire inférieure à 500 daltons.
C’est pour cela que les grosses molécules sont plus couramment directement injectées dans le derme par le médecin esthétique à l’aide de seringues.
Remarque : le dalton est une unité de poids moléculaire. Par définition un dalton (noté 1 Da) correspond au poids d’un atome d’hydrogène.
Ainsi, une molécule de 500 Da est une petite molécule, constituée au maximum d’une centaine d’atomes.
En ce qui concerne la nature même du produit cosmétique, il faut savoir que la nature des excipients doit être opposée à celle des principes actifs afin que ces derniers soient poussés à migrer hors du produit.
Par exemple, un principe actif de nature hydrophile devra plutôt être inséré dans une base lipidique. De plus, la forme galénique est également à prendre en compte : les émulsions favorisent la pénétration contrairement aux gels.
Prendre en compte les spécificités de chaque peau
La qualité de la peau
La qualité de la peau est également à considérer.
Plus l’épiderme sera fin et plus la pénétration sera facilitée. Par conséquent, la pénétration sera plus facile chez les enfants et les personnes âgées, qui ont une peau plus fine.
Pour les mêmes raisons, pour la peau africaine, qui est épaisse, l’absorption cutanée sera moindre que pour les peaux plus claires.
La perméabilité de la peau aux principes actifs varie également selon les régions du corps. Il a, par exemple, été mesuré qu’elle est bien plus importante sur le front que sur les membres.
Et dans ce cas, cela ne dépend pas seulement de l’épaisseur de l’épiderme mais également de son organisation.
L’hydratation cutanée
De même, le degré d’hydratation cutanée influence la pénétration cutanée des molécules. Plus l’hydratation de la peau est importante, meilleure sera l’absorption.
Par exemple, il est souvent relevé que la perméabilité d’une peau correctement hydratée est environ dix fois supérieure à celle d’une peau sèche.
La température cutanée
La température cutanée peut aussi jouer un rôle. Plus la peau sera chaude et plus la pénétration sera facilitée. La chaleur modifie la structure des couches lipidiques de la couche cornée, ce qui les rend plus fluides et donc plus perméables.
Et lors des soins alors...
À la lecture de tous les éléments précédents, vous vous rendez bien compte que l’odyssée des prin- cipes actifs dans la peau est un long chemin semé d’embûches. Toutefois leur pénétration cutanée lors de vos soins est possible.
Mais pour que cela soit le plus efficace possible, vous devriez suivre les conseils suivants :
- Tout d’abord, nous avons vu que la préparation de la peau est importante. Ainsi, vous pourrez au préalable réaliser un gommage (cosmétique ou mécanique), ce qui diminuera l’épaisseur de la couche cornée et facilitera donc le passage des molécules; en raccourcissant d’autant le chemin à parcourir.
En même temps, cette technique réchauffera la peau ; ce qui est également un bon point pour votre objectif. Ensuite, vous devrez tant que possible hydrater la peau (grâce à la pose d’un masque ou l’utilisation du Vapozone).
- Une fois ces activités réalisées, vous pourrez alors appliquer le produit cosmétique voulu sur la peau. Pour en faciliter l’absorption, il faut que la surface de contact soit la plus grande possible. Pour cela, il faut étaler au mieux le produit en une couche fine.
À ce stade, l’utilisation de matériel spécifique peut être envisagée. En institut, plusieurs appareils peuvent être utilisés pour favoriser le transport des molécules à travers les couches cutanées.
Il s’agit des appareils à haute fréquence, de l’ionophorèse qui utilise le pouvoir de courants galvaniques ou encore de la sonophorèse basée sur la production d’ultrasons.
Si vos produits sont de bonne qualité et si vous respectez toutes ces consignes, vos soins devraient gagner en efficacité. «Y a plus qu’à... !»