L'avenir de la chimie verte
Le scénario prévisionnel pour la filière Française de la chimie du végétal
À la faveur d’une demande dynamique en produits chimiques verts, notamment dans les cosmétiques et détergents, et de l’avancée de nombre de projets de R&D mais aussi de la mutation de la consommation vers davantage de «naturalité», le secteur gagne du terrain.
Après une hausse de 4 % en 2018, nous tablons sur une croissance de 5 % par an en moyenne d’ici 2022 pour l’activité de la filière.
La chimie du végétal représentera alors 12 % au mieux de l’ensemble de l’industrie chimique française (contre un peu plus de 10 % en 2018). Si la production de molécules chimiques bio-sourcées reste encore limitée, beaucoup de projets s’apprêtent à passer le cap de l’industrialisation.
À tel point que des investisseurs manifestent désormais un intérêt marqué pour certaines technologies arrivées à maturité. Toutefois, les retards ne sont pas à exclure compte tenu des moyens financiers à réunir, de l’émergence de complications techniques ou encore de la longueur des démarches.
En réalité, si la disponibilité de la biomasse semble assurée, plusieurs défis attendent les spécialistes de la chimie du végétal.
Il faudra en particulier convaincre les clients de basculer vers des intrants chimiques verts, faire face à l’émergence de solutions alternatives (biomatériaux non transformés chimiquement, procédés moléculaires, économie circulaire) et composer avec une concurrence mondiale exacerbée.
Et, en définitive, la fenêtre de tir pourrait être étroite face à une pétrochimie ultra dominante et des filières alternatives montantes comme la chimie animale et moléculaire. En somme, l’impulsion est donnée mais on peut s’interroger sur la capacité des acteurs de la chimie verte à changer de braquet.
Le jeu concurrentiel de ce marché
La chimie du végétal se structure en France autour de trois grands profils d’acteurs :
- les géants de la chimie,
- les sociétés de biotechnologies,
- et les industriels agro-alimentaires.
Les groupes de la chimie fine et de l’agro-industrie trustent huit des dix premières places de notre top 20.
Tereos et Roquette dominent le segment de l’extraction de la matière végétale pour la formation de produits chimiques et disposent respectivement de quatre et trois bioraffineries (féculerie, amidonnerie, glucoserie).
Les chimistes Solvay et Arkema sont les principaux fabricants de biopolymères/bioplastiques en France.
Quant au Français DRT, il s’est forgé une position de champion mondial dans la valorisation de dérivés chimiques à base de pin.
Autour de ces grands groupes, gravitent plusieurs acteurs spécialisés (Amadéite, Solabia ou encore Greetech) qui occupent des places de second rang mais montent en puissance.
Et, en réalité, ce sont les biotechs qui réalisent le gros des investissements en R&D à l’heure actuelle. Plusieurs start-up ont développé des solutions très prometteuses, notamment en chimie bleue en Bretagne (Agrimer ou Algaïa par exemple).
Les principaux axes de développement des opérateurs de la filière
Pour des raisons techniques ou financières, plusieurs projets ont pris du retard. Mais quelques biotechs -telles que Metex, Afyren, Evertree- semblent bien parties pour mettre enfin en service leur unité industrielle en 2020-2021.
Si la problématique du financement des projets reste prégnante, des fonds et des capitaux- risqueurs n’hésitent pas à investir dans la chimie du végétal comme l’illustre le franc succès des dernières levées de fonds.
En parallèle, les acteurs de la chimie biosourcée cherchent à mettre au point des molécules vertes à partir de la biomasse végétale non alimentaire (bois, pailles, déchets organiques, algues...).
Dans une démarche plus globale, les fabricants et laboratoires de recherche planchent également sur des bioprocédés enzymatiques, moins énergivores et moins polluants, permettant de réduire les coûts de production.
Outre les biotechs, les projets d’agrandissement sont surtout le fait d’agro-industriels et des pionniers de la chimie verte pour consolider leurs positions.
De leur côté, les grands groupes de chimie adoptent des stratégies opportunistes, réalisant des acquisitions ciblées ici ou là.
Les partenariats commerciaux à l’étranger sont aussi une piste explorée par nombre de chimistes du végétal pour assurer un meilleur retour sur investissement.